Qui est-ce?

Jane GOODALL

Jacqueline Remits •  jacqueline.remits@skynet.be

© Biosphoto, © the Jane Goodall Institute/ Shawn Sweeney, © the Jane Goodall Institute/ Michael Neugebauer

Je suis… 

Fille d’un père ingénieur et d’une mère auteure. J’ai une sœur. Petite, au lieu ­d’aller jouer avec d’autres enfants, je préfère rester seule dans le jardin, à observer des heures durant les animaux et dessiner ce que je vois. Parfois, je reste cachée au point qu’il arrive que mes parents me déclarent «disparue» à la police. Un jour, mon père me rapporte une peluche à l’effigie d’un bébé chimpanzé né au zoo de Londres. Un signe ? Adolescente, je décide que je veux vivre en Afrique auprès des animaux et écrire. Même s’il paraît fou, ma mère comprend mon projet et ne m’en dissuade pas. Au contraire, elle m’encourage, répétant: «Jane, si tu veux vraiment quelque chose, si tu travailles dur, si tu saisis chaque opportunité et que tu n’abandonnes pas, alors, d’une façon ou d’une autre, tu y arriveras». Quand la Seconde Guerre mondiale éclate, mon père part pour l’armée. À son retour, mes parents divorcent.

Après mes études secondaires, mes parents n’ayant pas les moyens de me payer des études universitaires, je me mets en quête d’un emploi. Pendant un an, j’enchaîne les petits boulots pour pouvoir me payer le voyage en Afrique. En 1957, invitée par une amie pour des vacances au Kenya, je prends le large. J’ai 23 ans. J’y rencontre le Dr Louis Leakey, anthropologue et paléontologue connu, qui effectue des fouilles dans la Corne de l’Afrique. Je le bluffe par mes connaissances au point qu’il me propose de devenir son assistante. Après avoir étudié les fossiles à Olduvai Gorge en Tanzanie, nous entamons une recherche sur les chimpanzés près du lac Tanganyika.

Auparavant, le Dr Leakey avait déjà souhaité mener lui-même une étude de terrain, pensant que les animaux pouvaient encore être source de découvertes. Il me propose alors de la mener seule dans la réserve de Gombe, convaincu que j’allais pouvoir m’adapter, car dotée du tempérament nécessaire pour vivre en solo sur une longue période.

 

Cela ne pouvait mieux tomber, c’est exactement ce que je voulais faire: apprendre des choses que personne d’autre ne savait, découvrir des secrets par le biais de patientes observations ! Pour obtenir les autorisations de l’État britannique, ma mère m’y accompagne. Munies de carnets de notes, de jumelles et de quelques affaires, nous arrivons en Tanzanie le 4 juillet 1960 pour ce qui allait devenir la plus longue étude de terrain des animaux sauvages dans leur environnement naturel. Gagner la confiance des chimpanzés sans les brusquer me demande une sacrée dose de patience. Au début, je m’approche à 500 m maximum. Un an plus tard, 30 m me séparent des familles. Après 2 longues années de patience, le contact est établi et je crée un rituel que j’appelle le «banana club». Tôt le matin, toujours à la même heure, je vais donner une banane à chaque chimpanzé. Un lien de confiance s’installe et je leur donne même des prénoms. Je comprends, en les observant, qu’ils ont une personnalité, une conscience. Une idée qui était encore totalement rejetée par les spécialistes. En 1963, le National Geographic décide de sponsoriser mes recherches et envoie un photographe et réalisateur, Hugo Van Lawick. Après un an de collaboration étroite, nous finissons par nous marier et avoir un fils, Hugo Eric Louis Van Lawick, né en 1967 à Nairobi (Kenya), avant de divorcer en 1974. Un an plus tard, je me remarie avec Derek Bryceson, membre du Parlement et directeur des parcs nationaux de Tanzanie.

Souvent critiquée par des spécialistes pour mes méthodes, sans diplôme universitaire, je suis pourtant acceptée par l’Université de Cambridge et décroche un doctorat en éthologie en 1965.

À cette époque…

En 1957, quand je débarque pour la première fois en Afrique, le Marché Commun est porté sur les fonts baptismaux par le Traité de Rome, tandis que Spoutnik 1, le premier satellite artificiel envoyé dans l’espace par les Soviétiques, tourne autour de la Terre. En 1960, quand j’arrive en Tanzanie, le Congo belge devient indépendant et le pays plonge rapidement dans la guerre civile. Cette année-là aussi, John F. Kennedy est élu président des États-Unis. En 1977, l’année où je fonde l’Institut qui porte mon nom en Californie, Elvis Presley succombe à une attaque cardiaque à Memphis tandis que la Callas et Charlie Chaplin tirent leur révérence également. Dans un tout autre domaine, le Concorde peut enfin atterrir à New York.

J’ai découvert…

Que le chimpanzé fabrique et utilise des outils. En passant des heures dans les arbres avec les ­primates, à imiter leur comportement, à manger leur nourriture, j’ai découvert qu’ils choisissaient une branche fine et solide, lui enlevaient les feuilles pour l’introduire dans une termitière et en récupérer les termites. Or, jusque-là, l’humain était considéré comme le seul être vivant capable de fabriquer des outils pour se nourrir. Il s’agissait donc bien d’une découverte, et celle-ci allait changer le regard porté sur l’animal. De là est née l’idée que les chimpanzés sont nos cousins. Autres points communs attestant de cette hypothèse: la force et la longévité des liens entre membres d’une même famille, une alimentation omnivore, un système social et des rituels au sein d’une même tribu, ainsi qu’un langage, certes primitif mais composé de plus de 20 sons.

Le nombre d’heures incalculable passé à observer les chimpanzés, à attendre, avec une patience infinie, qu’ils acceptent ma présence, à obtenir les premiers contacts, n’auront pas été vains.

Saviez-vous que…

Il existe près de 165 000 h de films, de photographies et d’articles parus dans le National Geographic, comme My life among wild chimpanzees. Les chimpanzés sont probablement les animaux sur lesquels il existe le plus de films et de recherches grâce aux travaux de Jane Goodall. Le magazine lui a permis de mener ses recherches dans de bonnes conditions, avec la présence de ses équipes, mais aussi en construisant la première vraie structure d’observation dans le parc de Gombe, le Gombe Stream Research Centre.

En 1977, Jane a créé, en
Californie, l’Institut Jane Goodall for Wildlife Research, Education
and Conservation. Depuis lors, il s’est implanté dans 23 pays, dont la
­Belgique. Après avoir étudié les chimpanzés pendant plus de 50 ans, c’est
avec tristesse qu’elle a quitté Gombe, mais avec enthousiasme aussi, portée par
un nouveau challenge, celui de sensibiliser les nouvelles générations aux
dangers de la pollution et de la déforestation sur les animaux sauvages.
Aujourd’hui, à 84 ans, Jane Goodall continue de donner des conférences
partout dans le monde. En 2002, le Secrétaire Général des Nations-Unies de
l’époque, Kofi Annan, l’a nommée Messagère de la Paix, un statut renouvelé par
Ban Ki Moon, son successeur.

 

Sorti début 2018, un documentaire réalisé par l’Américain Brett Morgen, simplement intitulé Jane, retrace sa vie d’aventurière passionnée.  Les critiques sont unanimes quant à ce film rempli d’émotions et de leçons de vie…

Voici la bande-annonce: https://www.cinenews.be/fr/films/jane/


Naissance 

3 avril 1934, Londres
(Royaume-Uni)

Nationalité

Britannique

Situation familiale 

Mariée 2 fois, mère d’un fils

 

Diplôme 

Newnham College, Cambridge, Darwin College, Cambridge

Champs de recherche 

Étude des chimpanzés, protection et bien-être animal

Distinctions 

Tyler Prize for Environmental Achievement (1997), Dame Commandeur de
l’ordre de l’Empire britannique (2004), prix japonais Kyoto pour la Science

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