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Méduses: les petites reines de l’océan

Laetitia MESPOUILLE • info@curiokids.net

© Alexander Reitter – stock.adobe.com, © Brunbjorn – stock.adobe.com, © W.carter/wiki, Mireille Hélène Beaudet, Wu and Dabiri (Science Advances, 2020) –    Peter Elliott

Prêt(e) à plonger dans le monde fascinant de ces créatures gélatineuses, à la fois étranges et gracieuses ? Tu verras, elles cachent bien des secrets ! 

Entre leur histoire vieille de 600 millions d’années, leurs prouesses scientifiques et leurs superpouvoirs inattendus, tu découvriras qu’elles sont bien plus qu’une simple terreur des plages. Que ce soit pour comprendre comment elles piquent (ouille), pourquoi elles éveillent la curiosité des scientifiques, ou même ce qu’elles pourraient changer dans nos assiettes, ce dossier te réserve plein de surprises. Alors, curieux(se) d’en savoir plus ? Jette-toi à l’eau et découvre cet animal fascinant.

Il était une fois

Imagine un monde sans dinosaures, sans poissons, sans tortues… mais avec des méduses ! Et oui, ces créatures à la texture de slime sont apparues il y a environ 600 millions d’années. C’est bien avant les dinosaures qui eux, ont foulé la terre il y a 230 millions d’années.

Les méduses appartiennent à l’embranchement des cnidaires (du grec Knidè, qui veut dire ortie: logique, elles piquent comme une ortie dans l’eau !). Qu’est ce qui les rend si spéciales ?
À cette époque, la majorité des créatures vivantes dans les mers étaient fixées au fond de l’eau ou se déplaçaient lentement en rampant. Les méduses, elles, ont été les premières à nager et à conquérir les mers et les océans. Sans poissons pour les chasser à l’époque, elles flottaient gracieusement, emportées par le courant. Bien qu’on s’en méfie, tu avoueras que leur apparence est fascinante: gélatineuses, un brin dégoutantes, elles sont aussi élégantes bien que parfois vicieuses. Tu en as certainement déjà vu à la mer, flottant avec leurs tentacules, prêtes à piquer, devenant la terreur des baignades.

 
 

SCHÉMA D’UNE MÉDUSE

Les méduses sont composées à 95% d’eau. Ce sont des animaux invertébrés, elles n’ont pas de squelette. Si tu observes bien, tu verras quelles sont ­parfaitement symétriques, ce qui leur permet de détecter leurs proies ou le danger tout autour d’elles, sans devoir tourner la tête comme nous.

La partie supérieure ­ressemblant à un chapeau est ­appelée ombrelle. C’est leur moteur. En contractant les muscles de l’ombrelle, elles expulsent de l’eau et se propulsent dans une direction. C’est un système simple mais redoutablement efficace pour se déplacer.

Les méduses n’ont ni cerveau, ni cœur. Et donc pas de sang. Leur corps est formé de 3 couches: la couche externe, la couche intermédiaire (appelée mésoglée) et la couche interne. La mésoglée est assez élastique et épaisse. Au centre de l’ombrelle, on a une poche unique qui sert à digérer: elle fait office à la fois de bouche et d’anus. Pratique non ?

Enfin, les méduses ont des tentacules. Ces filaments flottants ne servent pas qu’à faire joli: ils sont recouverts de cnidocytes, des cellules piquantes contenant des petits harpons appelés nématocystes. Ces harpons s’accrochent aux proies pour délivrer le venin. Attention, certaines méduses sont plus piquantes que d’autres…

 
Aujourd’hui, les méduses vivent partout. Elles peuvent habiter près du fond des océans (zone benthique), ou flotter dans les eaux ouvertes (zone pélagique). Certaines peuvent vivre à 4 500 m de profondeur ou même eau douce, bien qu’elles s’y font rares. Sur la côte belge, les méduses font des apparitions régulières, la méduse lune (Aurelia aurita) est la plus commune. Avec ses 4 anneaux visibles à travers son corps transparent, elle n’est pas vraiment dangereuse pour l’Homme car ses filaments urticants sont trop petits pour percer notre peau. Cependant, la cyanée bleue (Cyanea lamarckii), reconnaissable à sa couleur bleue vive et ses longs filaments, peut provoquer une sensation de piqûre d’ortie.

1. Aurelia aurita

2. Cyanea lamarckii

D’autres espèces sont plus rares, comme la méduse à crinière de lion (Cyanea capillata), dont les piqûres peuvent être très douloureuses, ou la méduse rayonnée (Chrysaora hysoscella), qui peut laisser des marques semblables à des brûlures. Certaines, comme la méduse rhizostome (Rhizostoma pulmo), impressionnent par leur taille bien que totalement inoffensives.

 
Mais dis-moi… Comment un truc gélatineux sans coquille ni carapace a pu survivre aussi longtemps parmi tant de prédateurs marins ?
 
 

Le selfie du jour

LA MÉDUSE IMMORTELLE

Imagine une créature capable de défier le temps, comme Wonder Woman. C’est exactement ce que fait Turritopsis dohrnii. Cette minuscule méduse, qui ne mesure qu’1 cm de diamètre, possède un superpouvoir: elle peut inverser son cycle de vie ! Lorsqu’elle est menacée ou stressée, elle retourne à l’état de polype, une forme juvénile, pour recommencer sa vie. Et elle peut répéter ce processus indéfiniment, ce qui fait d’elle un des seuls organismes biologiquement immortels connus. Mais comment fait-elle ? La réponse se trouve dans son ADN. La méduse immortelle est capable de réparer et de protéger ses gènes, tout en maintenant un nombre élevé de cellules souches, ces cellules extraordinaires qui peuvent se transformer en n’importe quel type de cellule. Ce mécanisme intrigue les scientifiques, qui voient en cette méduse une source d’inspiration pour ralentir le vieillissement humain. Mais attention, être immortelle ne protège pas la méduse des maladies ou des prédateurs ! Même si elle ne meurt pas de vieillesse, la vie dans l’océan reste un défi.

 
Tel est pris qui croyait prendre

Comment font les méduses, qui ont l’air si fragiles, pour survivre dans le monde impitoyable des océans ? Avant d’être de belles proies pour certaines espèces, les méduses sont avant tout de redoutables prédateurs. Presque aveugles, elles piquent tout ce qu’elles touchent, pour être sûres de pouvoir manger. Grâce à leurs tentacules équipés de cnidocytes, elles sont toujours prêtes à déclencher leurs minuscules harpons (les nématocystes) pour s’agripper à leur futur repas. Au moindre contact, ces harpons s’activent comme des ressorts, injectant un venin qui provoque cette sensation de brûlure bien connue. Pour leur proie, ce venin peut être paralysant, rendant l’évasion impossible. Les méduses sont ainsi capables de saisir de minuscules poissons, des larves ou des crevettes paralysés avant de les porter à leur bouche grâce à leurs bras oraux. Pas besoin de couteau ni de fourchette: les enzymes digestives font le reste. Elles décomposent rapidement le repas dans son estomac.

Ce qui est encore plus incroyable, c’est que même échouée sur la plage, une méduse peut encore piquer. Ses cnidocytes restent actifs, prêts à réagir si on les touche. Si ces mini harpons sont à usage unique, il se régénèrent par contre à l’infini… Impressionnant, non ? Si tu te fais piquer, rince ton bras à l’eau de mer. Ne frotte surtout pas: il faut retirer les nématocystes restants. S’ils sont invisibles, pas de panique, il suffit de les retirer en utilisant de la mousse à raser et racler avec une carte bancaire.

Malgré leur arsenal redoutable de cellules urticantes, les méduses ne sont pas invincibles. De nombreux animaux marins, comme les tortues luth et Caouanne, se régalent de ces créatures gélatineuses. Les thons et les espadons, rapides et puissants, aiment aussi en faire leurs repas. Même les albatros et les manchots, oiseaux des mers, les dévorent avec appétit.

Et ce n’est pas tout ! Une étude récente a révélé qu’un bien plus grand nombre d’espèces se nourrissent de méduses qu’on ne le pensait. Pourquoi ? Avec leur abondance dans les océans, elles deviennent une source de nourriture facilement accessible, surtout pour des prédateurs dont les proies naturelles se raréfient. Et toi ? Tu en mangerais ou pas ?
 
 
 

   Le truc de ouf !

ET SI ON REMPLAÇAIT LE BŒUF PAR  DE LA MÉDUSE DANS TON  HAMBURGER ? 

Et si un jour, tu mangeais un burger… de méduse ? Oui, tu as bien lu ! Certains scientifiques pensent que les méduses pourraient devenir le prochain super aliment. Pourquoi ? Parce qu’elles sont riches en protéines, contiennent des oméga-3 et plusieurs autres substances excellentes pour notre santé. Elles pourraient remplacer des aliments comme les œufs et aider à nourrir une planète de plus en plus peuplée. En Asie, on mange déjà des méduses depuis longtemps dans des salades ou des soupes, et on les considère comme un mets délicat. En Europe, l’idée est encore un peu étrange, mais des projets comme «Go Jelly» cherchent à rendre les méduses plus appétissantes. Des chips de méduse à l’apéro, ça te tente ? Avant cela, dernière étape: l’Europe doit valider l’usage des méduses comme super aliment. Ça serait génial non ?  

 
ELLES SONT PARTOUT: DES LABOS AUX ÉTOILES

1) DES MÉDUSES PRIX NOBEL

Les méduses sont des sources d’inspiration pour la science. En 1913, Charles Richet a reçu le prix Nobel de médecine pour avoir étudié le venin de certaines méduses. Grâce à ses travaux, on comprend aujourd’hui l’anaphylaxie, une réaction allergique grave pouvant être mortelle. Imagine, découvrir que chaque piqûre rend la victime encore plus sensible au venin, une vraie révolution à l’époque ! Et ce n’est pas tout. En 2008, un autre prix Nobel, cette fois en chimie, a récompensé Osamu Shimomura et ses collègues pour une découverte fascinante: une protéine fluorescente tirée de l’Aequorea victoria, une méduse lumineuse. Cette protéine, utilisée comme marqueur biologique, a permis aux chercheurs de mieux comprendre des maladies comme Alzheimer ou d’étudier les cellules cancéreuses. Grâce à ces méduses, les chercheurs peuvent littéralement «allumer» les cellules pour observer leur fonctionnement. Qui aurait cru qu’un animal aussi simple puisse éclairer autant de mystères de la vie ? 

ACTU Science

MÉDUSES CYBORGS

Et si les méduses devenaient nos alliées pour explorer les océans ? C’est l’idée de John Dabiri, un ingénieur qui s’est inspiré de ces créatures pour créer des «méduses bioniques». Ces méduses augmentées pourraient nous aider à mieux comprendre les océans et le climat. Pourquoi des méduses ? Parce qu’elles sont déjà les reines des profondeurs. Elles nagent partout, des eaux chaudes des tropiques aux mers glacées des pôles, et atteignent même les coins les plus reculés des abysses. Pourquoi fabriquer un robot quand on peut transformer une méduse en exploratrice ? 

En ajoutant des capteurs sur leur ombrelle et un peu d’électronique pour améliorer leur nage, les scientifiques ont créé de véritables méduses cyborgs. Et elles sont efficaces: elles nagent 4,5 fois plus vite que leurs cousines naturelles, peuvent mesurer la température, la salinité ou le niveau d’oxygène dans l’eau.

Le défi ? Faire en sorte que ces espionnes gélatineuses résistent à la pression des grandes profondeurs. Mais si ça marche, elles pourraient nous révéler les secrets des fonds marins, tout en nous aidant à surveiller la santé de nos océans. 

2) DES MÉDUSES DANS L’ESPACE

Les méduses sont allées là où peu d’animaux ont osé poser leurs tentacules: dans l’espace ! En 1991, des milliers de bébés méduses, appelés polypes, ont embarqué à bord d’une fusée pour un voyage spatial de 9 jours. Dans des sacs remplis d’eau artificielle, elles ont grandi jusqu’à devenir de jeunes méduses capables de nager librement. Pourquoi des méduses ? Parce qu’elles possèdent des statolithes, des capteurs d’équilibre similaires à nos otolithes humains. Le mot est compliqué mais ce que tu dois retenir c’est que ces structures présentes dans nos oreilles nous aident à tenir debout. En étudiant ces créatures simples, les chercheurs espéraient comprendre comment les humains pourraient s’adapter à la vie dans l’espace. Cependant, les méduses nées en apesanteur ont eu du mal à nager une fois de retour sur Terre. Comme si elles avaient le vertige, elles se déplaçaient bizarrement, prouvant que l’apesanteur avait affecté leur système nerveux. Ces découvertes ont permis aux scientifiques d’imaginer les défis que pourraient rencontrer des bébés humains nés dans l’espace… 

   BIG DATA

190
c’est le nombre d’espèce différente  de méduses (SCYPHOMÉDUSES)

40 m
c’est la longueur de la plus grande  méduse sur terre. Son nom ? La  méduse à crinière de lion.



3 cm

c’est le diamètre de la plus petite  méduse, appelée irukandji. Petite  mais très redoutable. 

 
3) DES MÉDUSES PAR MILLIARDS

Imagine un océan qui devient une soupe épaisse de méduses… Ça semble étrange, mais certains scientifiques craignent que cela puisse arriver. On appelle cela la «gélification» des océans car dans certaines régions, les méduses prolifèrent au point de créer une véritable invasion gélatineuse. Mais pourquoi y a-t-il autant de méduses ? La réponse se trouve dans nos actions. La surpêche, par exemple, élimine leurs prédateurs naturels comme les thons et les tortues. Résultat: moins de chasseurs de méduses pour réguler leur population. En plus, le réchauffement des océans agit comme un turbo pour leur croissance et leur reproduction. Et ce n’est pas tout. La pollution, notamment les engrais qui se déversent dans les mers, booste la croissance du plancton végétal, qui est leur plat préféré. Imagine un buffet géant toujours ouvert pour les méduses… c’est exactement ce qui se passe ! Les scientifiques nous disent que ces «blooms» de méduses, comme on les appelle, sont un signe que l’océan est en déséquilibre. Il est temps de se bouger.

KESAKO ?

LES POLYPES

Les méduses ne naissent pas directement sous la forme que tu connais. Leur cycle de vie commence avec une forme bien différente : le polype ! Ressemblant à une petite anémone blanche, le polype est fixé sur un support dur au fond de l’eau. Il joue un rôle crucial dans la reproduction des méduses. Ce petit être, bien qu’immobile, est un champion de la survie et de la multiplication.

Comment fait-il ? Le polype peut se diviser en plusieurs segments, comme une pile d’assiettes, pour libérer des bébés méduses appelés éphyrules. Ces éphyrules grandiront et deviendront les méduses que tu connais. Mais ce n’est pas tout ! Le polype peut aussi créer des clones de lui-même ou libérer des larves qui iront nager librement avant de se fixer à leur tour. Cette incroyable capacité de multiplication permet aux méduses de coloniser les océans rapidement.

 
LE P’TIT DICO

CNIDAIRE: C’est un animal marin possédant des tentacules et qui peut piquer pour se défendre ou attraper à manger.

URTICANT: Quand ça pique ou ça brûle après l’avoir touché, comme les orties.

CNIDOCYTES: Ce sont les cellules urticantes situées sur les tentacules des méduses. Il s’agit de petits compartiments qui abritent un mini dard en forme d’aiguille.

NÉMATOCYSTES: C’est le mini-dard en forme d’aiguille qui se trouve dans le cnidocyte.

SYMÉTRIQUE: Ça signifie qu’une moitié est l’image miroir de l’autre moitié.

POLYPE: Un tout petit animal marin restant accroché au fond de l’eau et qui peut donner naissance à des bébés méduses.

APESANTEUR: C’est quand on flotte parce qu’il n’y a pas de gravité, comme les astronautes dans l’espace.

Ton p’tit LABO

Une expérience à faire avec Curiokids: «   Des bulles de savon pour faire des cartons d’invitation»

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