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Thibault GRANDJEAN • grandjean.thibault@gmail.com

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Les Nobel 2024

Chaque année, au mois d’octobre, l’Académie des Sciences de Suède décerne les prix Nobel à «des personnes qui auront rendu de grands services à l’humanité, permettant une amélioration ou un progrès considérable dans le domaine des savoirs et de la culture

Le Prix de physiologie et de médecine a été décerné aux Américains Victor Ambros et Gary Ruvkun, pour l’identification d’une voie de contrôle de l’activité des gènes par des micro-ARN. Alors que l’on a longtemps pensé que les gènes étaient contrôlés en amont, au niveau de l’ADN, les 2 chercheurs ont ouvert la voie à un contrôle en aval. Pour le comprendre, il faut voir les gènes comme un code qui va servir à fabriquer des protéines. Le gène est transcrit en ARN messager, qui sera à son tour traduit en protéine. Les microARN se lient ainsi aux ARNm, empêchant leur lecture et donc leur traduction. Ce mécanisme fondamental du vivant se retrouve dans toutes les cellules animales et végétales, et de nombreux processus en dépendent comme la mémoire ou la formation de tumeurs.

Le Prix de physique a été attribué à l’Américain John Hopfield et au Britannique Geoffrey Hinton «pour les découvertes et inventions qui ont permis l’apprentissage automatique grâce à des neurones artificiels». Ces neurones artificiels sont à la base des systèmes d’intelligence artificielle dont on parle le plus aujourd’hui. Dans les années 1980, les 2 chercheurs ont montré qu’un réseau de fonctions mathématiques, reliées entre elles par des connexions plus ou moins fortes, pouvait mémoriser, apprendre, découvrir des motifs… Bref, développer des compétences alors propres aux cerveaux. Ils ont ainsi appliqué les principes de la physique statistique, une science qui décrit les comportements macroscopiques à partir de composants individuels, c’est-à-dire comme un tout qui serait plus que la somme des parties.

Le Prix de chimie consacre lui aussi l’intelligence artificielle, et a été décerné au Britannique Demis Hassabis et aux Américains John Jumper et David Baker. Ce dernier a été récompensé «pour la conception computationnelle des protéines», tandis que le duo Hassabis et Jumper a été récompensé «pour la prédiction de la structure des protéines». Les protéines sont les molécules actives du vivant: les enzymes, les récepteurs cellulaires, ainsi que quantité d’hormones. Ces dernières sont formées d’une chaîne de petites molécules qui est alors pliée et repliée dans un enchevêtrement impossible, mais crucial: c’est sa forme qui donne à la protéine sa fonction. Seulement, les biologistes, eux, ont uniquement accès à la composition de la chaîne et non à sa forme. Dans les années 2000, David Baker a contribué à résoudre le problème du repliement de la chaîne d’acides aminés en s’appuyant sur des règles physico-chimiques afin de prédire une forme. Et en 2020, Hassabis et Jumper ont mis au point un algorithme d’intelligence artificielle, AlphaFold, capable de prédire la forme de la protéine uniquement à partir de sa séquence d’acides aminés.

Enfin, Daron Acemoglu, Simon Johnson et James Robinson ont reçu le Prix 2024 du jury de la Banque de Suède en hommage à Alfred Nobel (dit Prix Nobel d’économie) «pour leurs études sur la façon dont les institutions sont formées et affectent la prospérité.» Grâce à une approche de la croissance non plus strictement mathématique, mais prenant en compte l’histoire et les réalités institutionnelles des économies étudiées, les chercheurs ont montré que les institutions des pays et la présence d’un état de droit stimulent le progrès technique et économique. D’après les auteurs, l’absence d’institutions dans certains pays est due à l’attitude des pays colonisateurs occidentaux qui, dans les endroits inhospitaliers pour eux, se sont contentés de réduire la population en esclavage et d’exporter ses ressources.

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L’ACTU DES LABOS

Mieux évaluer les représentations  corporelles des  personnes autistes

Le terme de représentation corporelle regroupe divers concepts, depuis la perception instinctive de notre corps (même en fermant les yeux, nous sommes capables de toucher le bout de notre nez) jusqu’à des représentations plus construites socialement, comme nos complexes ou nos croyances vis-à-vis de notre apparence. Chez les personnes atteintes d’un trouble autistique, ces représentations corporelles peuvent représenter un véritable challenge, avec des difficultés de coordination spatiale, de conscience de l’espace autour de soi, ou d’intégration sensorielle, au point de perturber de nombreux aspects de leur vie de tous les jours. Pour la première fois, une équipe de chercheurs de l’UNamur a mené une étude holistique de tous les paramètres influant sur les représentations corporelles de personnes atteintes d’un trouble autistique, afin de mieux comprendre leur influence sur leur autonomie et leur qualité de vie. En mêlant questionnaires traditionnels et une analyse de données issues de capteurs corporels comme des montres connectées ou des smartphones, les résultats obtenus devraient aider à la fois les personnes autistes à mieux comprendre leurs représentations corporelles, et les personnes aidantes à mieux calibrer leurs interventions afin de subvenir efficacement à leurs besoins spécifiques.

   J. Mourad et al. Sensors, 2024

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Améliorer la motricité  des enfants atteints  de paralysie

Avec une prévalence de 2 naissances pour 1 000, soit 250 à 300 naissances chaque année en Belgique, la paralysie cérébrale est la cause la plus fréquente de handicap physique. Les causes de cette paralysie sont nombreuses, allant d’une infection de la mère lors de la grossesse à un manque d’oxygène du fœtus lors de l’accouchement. Depuis plusieurs années, les protocoles de détection se sont améliorés, et cette pathologie est prise en compte de plus en plus tôt. Tablant sur la plasticité cérébrale maximale des enfants avant l’âge de 2 ans, la prise en charge des enfants consiste notamment en une activité soutenue visant à développer la motricité des membres paralysés. Une équipe de l’UCLouvain a testé avec succès un nouveau protocole intensif de 50 heures, réparties sur 2 semaines, ciblant particulièrement les enfants atteints de paralysie cérébrale unilatérale, en proposant une approche centrée de façon simultanée sur le tronc et les membres inférieurs et supérieurs. Alors que cette technique a déjà prouvé son efficacité sur les enfants plus âgés, cette étude a démontré son efficacité sur la motricité d’enfants âgés de 6 à 18 mois, avec une plus grande utilisation de la main atteinte par un handicap à la fin de la période de test.

   A. Carton de Tournai et al. JAMA Network Open, 2024

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Autonomie et bien-être

Alors que la plupart des études sur la santé et la vieillesse suggèrent que la dégradation des conditions de santé se fait de façon graduelle au cours des années, des chercheurs de l’ULB se sont penchés sur la survenue d’événements ponctuels, comme une perte subite d’autonomie à un âge relativement avancé, et ses effets sur le bien-être cognitif et affectif des personnes, ainsi que sur leur bonheur général. Les résultats de l’étude montrent d’abord que les handicaps de courte durée n’ont qu’un effet transitoire sur la santé et le bien-être des personnes, ce qui est une découverte importante démontrant que même les limitations fonctionnelles sévères ne sont pas irrémédiables. Pour autant, l’étude montre également que les pertes d’autonomie de plus longue durée, voire définitives, ont un impact bien plus marquant sur la vie affective, en particulier concernant la qualité de vie ou la survenue de dépression. Les résultats de cette étude devraient encourager les politiques publiques à prendre en compte le vieillissement dans toute sa complexité, alors que le vieillissement des populations occidentales s’accélère.

   T. Kohler et al. The Journals of Gerontology: Series B, 2024

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Décrypter la dégénérescence neuronale

Il existe en biologie un concept très répandu dénommé la dégénérescence, mais qui n’est pas une maladie. Ce terme désigne le fait que les éléments d’un ensemble plus grand, comme les neurones du cerveau, avec des caractéristiques très différentes les unes des autres, assurent paradoxalement fiabilité et robustesse au système. Cette variabilité rend ainsi le cerveau plus adaptable aux perturbations qui peuvent survenir. D’un autre côté, cette dégénérescence rend les traitements plus compliqués, en raison de cette même adaptabilité. Plus spécifiquement, il existe des protéines membranaires dans les neurones, dénommées les canaux ioniques, qui régulent leur activité électrique. Ces canaux peuvent être très différents d’un individu à l’autre, et même d’un neurone à l’autre. Une équipe de chercheurs de l’ULiège a adopté une approche originale en appliquant des outils mathématiques pour mieux comprendre cette propriété. Ils ont ainsi mis en lumière 2 mécanismes distincts à l’origine de cette dégénérescence, levant ainsi un peu plus le voile sur les principes de la neuromodulation, un processus par lequel le cerveau ajuste son activité en réponse à des signaux internes ou externes.

   A. Fyon et al. PNAS Nexus, 2024

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Nouvelle génération de pesticides

Alors que la biodiversité s’effondre, les agriculteurs doivent d’urgence réduire leur utilisation de pesticides afin de rendre l’agriculture plus soutenable. L’Union européenne, par le biais des projets transfrontaliers Interreg, a mis sur la table 14 millions d’euros pour financer une série de projets rassemblés sous le titre Biocontrol 4.0 et destinés à mettre au point de nouvelles substances de contrôle des ravageurs moins nocives, en associant les recherches en biotechnologie et les services du numérique. Pas moins de 24 institutions belges et françaises participeront au projet coordonné par la faculté Agro Biotech de Gembloux. Ainsi, l’UMons sera chargée de coordonner le volet Trans-Pest, qui vise à tester l’effet des changements climatiques sur l’efficacité des solutions de bioinsecticides déjà existantes, et d’en tester de nouvelles en prenant en compte cette nouvelle réalité. Quant à Multitel, le centre de recherche montois, il proposera des solutions numériques permettant notamment la détection locale des risques, afin d’aider les agriculteurs à optimiser le calendrier des traitements et à réduire l’utilisation de pesticides synthétiques.

    https://www.biocontrol4-0.eu

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En bref

Malgré leur contexte historique et géographique commun, l’espérance de vie des citoyens transfrontaliers résidant dans les provinces de Liège, du Limbourg, et la région urbaine d’Aix-la-Chapelle est très variable. Pendant 3 ans, un consortium universitaire dénommé «Blue Zone» va explorer les facteurs qui expliquent ces différences, via un projet de science citoyenne à grande échelle. Il dressera notamment la carte de diverses variables cardiométaboliques, de santé physique et mentale des populations transfrontalières en Euregio, et visera à mettre en place de nombreuses actions préventives.

    https://www.interregemr.eu/home-fr

 

Une équipe de chercheurs de l’ULB s’est penchée sur l’utilisation d’approches moléculaires pour suivre et comprendre la circulation de 20 virus dans des populations animales. Ces approches permettent de mieux comprendre l’histoire de dispersion d’un virus et estimer sa vitesse de diffusion dans une population. Les analyses révèlent une large gamme de vitesses de diffusion mais aussi, dans certains cas, la survenue d’évènements responsables d’une dispersion longue distance, comme le commerce d’animaux, soulignant l’importance de l’interconnexion des santés animales et humaines.

   Dellicour et al. PLoS Biology, 2024

 

L’UNamur va participer au projet PFAS-B, porté par la société IBA, qui a pour objectif de valider expérimentalement un système de traitement pour l’élimination des polluants éternels dans l’eau et adsorbé sur des charbons actifs, grâce à l’utilisation combinée de faisceau d’électrons et d’une action biologique avec régénération des supports filtrants.

    www.unamur.be

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L’ACTU DE L’INNOVATION

Des biopesticides alternatifs

Pour les agriculteurs du monde entier, les maladies fongiques sont l’ennemi numéro 1 de leurs cultures, détruisant jusqu’à 40% des récoltes annuelles au niveau mondial. Malheureusement, les méthodes de lutte actuelles ont également des conséquences désastreuses sur la santé du sol et la biodiversité des insectes. De nombreuses recherches s’orientent donc vers des biopesticides, un terme qui désigne le plus souvent des microorganismes, comme des bactéries, capables d’infecter les champignons et ainsi protéger les plantes. Mais ces derniers sont souvent difficiles à manier pour les agriculteurs. La start-up belge BioCSol, issue de l’UCLouvain, lance donc sur le marché des biopesticides innovants, conçus à partir de substances actives d’origine microbienne, plus stables et simples à utiliser. Ces molécules, biodégradables et peu toxiques, peuvent être utilisées en agriculture biologique. Les premiers tests en conditions réelles confirment leur efficacité, promettant une alternative durable aux pesticides chimiques, tout en réduisant les risques de résistance des pathogènes.

    https://www.linkedin.com/company/biocsol/

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Une nouvelle carte des sols bruxellois

L’imperméabilité du sol a un impact important sur l’environnement et sur la viabilité de la ville. La présence de surfaces imperméables dans les zones urbaines augmente le risque d’inondations et pose des problèmes pour la recharge des nappes phréatiques, la qualité de l’eau des cours d’eau et le microclimat urbain. Or, le nombre de ces surfaces est en augmentation dans la Région de Bruxelles-Capitale, avec 53,2% de sols imperméables. Afin d’en identifier précisément la nature, comme des places de parking, des terrasses sur des terrains privés ou encore des petits sentiers, la Région s’est dotée d’une nouvelle carte, plus précise, élaborée notamment à l’aide d’images satellites obtenues grâce au réseau d’observation de la Terre Sentinel, avant d’être classifiées à l’aide d’un modèle d’IA. Au total, 92,3% des surfaces de Bruxelles ont été cartographiées et les données, disponibles en libre accès, devraient permettre d’améliorer le développement urbain.

    https://environnement.brussels

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Des revêtements et des adhésifs durables et  biosourcés

L’industrie du papier produit un certain nombre de sous-produits peu valorisés, comme l’hémicellulose, et ce alors même que l’hémicellulose constitue 30 à 45% de la biomasse terrestre. Le projet européen Hemicoat, soutenu par le Service Public de Wallonie et piloté par Materia Nova, a pour ambition de développer des processus à faible impact environnemental visant à hydrolyser l’hémicellulose afin d’obtenir des molécules à haute valeur ajoutée comme l’acide itaconique. Ce dernier peut être utilisé comme brique de base pour des revêtements d’implants et des adhésifs durables. L’accent sera notamment mis sur leurs propriétés mécaniques et antibactériennes ainsi que sur leur caractère ignifugeant. Prévu pour 2 ans, Hemicoat a été financé par le mécanisme Cornet de l’UE. Hemicoat doit fournir des solutions alternatives et durables à un réseau de PME européennes, qui utilisent de l’acide itaconique issu de l’industrie pétrolifère. Plusieurs sociétés ont d’ores et déjà marqué leur intérêt pour les solutions développées.

    hemicoat.eu

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Enfin traiter l’épilepsie réfractaire

Alors que 30% des 75 000 Belges souffrant d’épilepsie sont réfractaires à tout traitement médicamenteux, aucune chirurgie n’était jusqu’à présent possible pour les patients dont le foyer épileptogène se trouve dans les zones cérébrales fonctionnelles qui contrôlent le langage, la motricité ou la vue. Une carence comblée par l’Hôpital Universitaire de Bruxelles, qui propose désormais à ces patients une thérapie peu invasive: la thérapie thermique interstitielle par laser (LITT). Cette dernière offre une précision neurochirurgicale inégalée en ciblant les tissus atteints tout en préservant les structures cérébrales saines. Cette technique utilise en effet la chaleur dégagée par la lumière d’un laser pour détruire, de manière sélective, les tissus cérébraux responsables des crises d’épilepsie. Combinée à une Imagerie par Résonance Magnétique (IRM) pour visualiser, en temps réel, l’évolution des zones cérébrales traitées, la LITT atteint une efficacité sans précédent de 50 à 80% des patients libérés des crises, même sévères, à moyen terme. Cette thérapie réduit par ailleurs considérablement les risques de complication postopératoire ainsi que la durée d’hospitalisation des patients.

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Une poudre pour améliorer la régénération osseuse

Lors d’une fracture, le corps humain est tout à fait capable de se soigner tout seul et sans séquelles, pour peu que l’on stabilise la fracture à l’aide d’un plâtre. Pour autant, après 55 ans, la densité osseuse s’amenuise, et les fractures guérissent moins bien, surtout en présence de comorbidités comme le diabète, le tabac ou l’obésité. La spin-off de l’UCLouvain NovaDip développe actuellement un produit potentiellement révolutionnaire et encore unique au monde. La technique consiste à prélever des cellules souches adipeuses chez le patient pour ensuite les amener à se différencier en cellules spécifiques avec un potentiel régénératif important. En effet, ces cellules, intégrées à une matrice en 3D, vont sécréter des protéines, des facteurs de croissances, ainsi que des miRNA très spécifiques, le tout permettant d’accélérer une régénération tissulaire stable. Le produit développé se présente alors sous la forme d’une poudre qui peut directement être appliquée à l’endroit désiré. Actuellement en phase de test clinique, ce produit montre de bons résultats et l’entreprise belge a obtenu l’accord de l’autorité de régulation américaine, la FDA, pour un essai chez des patients atteints de pathologies du disque intervertébral.

    novadip.com

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En bref

Treize initiatives belges ont été récompensées par la Fondation Roi Baudouin pour une économie plus circulaire. Ainsi, à Bruxelles, Repair Together – en partenariat avec l’ULB – a été saluée pour lutter contre l’accroissement des déchets à travers une formation sur la réparation par impression 3D. Et en Wallonie, l’ASBL LaSemo d’Enghien a notamment été récompensée pour son projet de recyclage de bâches publicitaires en mobilier durable et en accessoires écologiques.

    https://kbs-frb.be/fr/fonds-ing-pour-une-economie-plus-circulaire-2

 

Light It Up, une start-up d’étudiants de Mons a remporté la 13e édition du concours Startech, qui vise à découvrir des talents émergents via des projets innovants. Leur solution consiste en un système plug and play directement installé sur les lampadaires publics, qui permet d’adapter la luminosité en fonction du passage dans la rue via un capteur de mouvements infrarouge. Le système est en outre équipé d’un système de détection automatique des pannes.

    Lightitup.odoo.com

 

L’entreprise liégeoise Tonomia a rejoint le programme Inception du géant américain des semi-conducteurs Nvidia. Ce programme vise à développer des centres de données d’intelligence artificielle durables, alors que l’entreprise est spécialisée dans les solutions d’énergie solaire pour les applications pilotées par l’IA, combinant la production d’énergie renouvelable avec des solutions de calcul à haute performance.

 

Le 3 décembre dernier, la sonde spatiale Proba-3, pour laquelle la Belgique a largement contribué à la conception, s’est envolée du Centre spatial indien de Satish Dhawan. La sonde est une prouesse technologique, puisqu’il s’agit de 2 éléments volant ensemble à une distance de 150 m l’un de l’autre, formant un observatoire solaire virtuel. Le premier satellite servira d’occulteur pour créer une éclipse solaire artificielle de façon continue, tandis que l’autre, le coronographe, étudiera le halo autour du Soleil.

    www.spacebel.be

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INTERVIEW

Défossiliser l’industrie

Lionel Dubois, chercheur à l’UMONS, a remporté le Prix Jean-Pierre Contzen de l’Académie Royale de Belgique pour son projet de recherche DEMIXC4U de capture et d’utilisation du CO2.

Pouvez-vous nous présenter le projet DEMIXC4U ?

Le projet comporte 2 grandes parties, l’une centrée sur la capture de carbone, et l’autre sur sa valorisation. Dans la première, on met en contact des fumées issues d’industries très émettrices de CO2, comme les cimenteries, avec un solvant liquide afin de le capturer. Ensuite, le CO2 est récupéré lors de la régénération du solvant. Habituellement, cette étape de régénération est très coûteuse en énergie, en raison des températures nécessaires. C’est pourquoi nous menons actuellement des recherches sur un solvant dit démixant, qui a la propriété de se scinder en 2 phases au contact du CO2. En ne régénérant que la phase contenant véritablement le CO2, cela permet de diminuer les coûts en diminuant la quantité de solvant à traiter. De plus, nous investiguons également la possibilité de combiner l’utilisation de ce solvant à des catalyseurs qui pourraient contribuer à la réduction de la consommation énergétique.

Ce projet est couplé à une 2e partie, qui consiste à combiner le CO2 à de l’hydrogène vert, issu de sources renouvelables, et ainsi créer des carburants de synthèse comme du méthane, du méthanol ou encore du kérosène, plus facilement transportable que l’hydrogène. Cette opération, dite «exothermique», dégage beaucoup de chaleur, qui peut être utilisée directement au sein de la première phase, réduisant encore davantage l’énergie totale nécessaire.

 Pourquoi ne pas stocker le CO₂, comme le font déjà d’autres projets ?

Il s’agit d’une voie parallèle, visant à accompagner la transition énergétique, en utilisant préférentiellement des émissions de CO2 qui sont inévitables. En effet, lors du processus de fabrication du ciment, près de 2/3 du CO2 émis ne provient pas de la combustion, mais de la réaction chimique de décarbonatation de la matière première, à savoir la craie (carbonate de calcium). L’objectif de ce projet n’est donc pas de permettre à une industrie de continuer à fonctionner comme avant, mais bien de défossiliser l’économie, en fournissant aux avions, par exemple, des carburants qui ne soient plus issus d’énergies fossiles. La capture de carbone ne doit être qu’un levier supplémentaire dans une société qui doit avant tout éliminer toutes les émissions de carbone possibles dans l’atmosphère outre, la communication catastrophiste n’est aujourd’hui guère pertinente.

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DATA

13%

En 2023, 665 personnes ont été diagnostiquées avec le VIH en Belgique, soit une augmentation de 13% par rapport à 2022. «Le nombre de diagnostics a augmenté en 2023 dans tous les groupes de population, avec une augmentation notable chez les hommes belges ayant des rapports sexuels avec des hommes, ainsi que chez les hommes et les femmes hétérosexuels d’origine belge et non belge», précise Sciensano dans un communiqué. Parmi les raisons qui expliquent l’augmentation des cas, le recul de l’utilisation du préservatif, notamment en raison de la banalisation de l’image du VIH et de la perception atténuée de sa gravité. Et le VIH n’est pas la seule infection sexuellement transmissible à connaître une recrudescence: la gonorrhée et la chlamydia sont également en hausse en Belgique. Or, les personnes atteintes d’une IST sont plus à risque d’infection par le VIH si elles y sont exposées. Plus que jamais, il est donc important de rappeler que le préservatif est le seul moyen efficace d’éviter une infection sexuellement transmissible.

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COUP D’CRAYON

   Vince • vincent_dubois@me.com

Il n’y aurait pas que les humains qui trouvent que la première gorgée de bière fait partie des plaisirs minuscules de la vie. Une synthèse de différentes études publiées dernièrement montre que l’éthanol, apparu il y a environ 100 millions d’années avec la fermentation des fruits sucrés, est une substance que l’on trouve dans quasiment tous les écosystèmes de la Terre, et que de nombreux animaux sont capables de le métaboliser. «Nous nous éloignons de cette vision anthropocentrique selon laquelle l’alcool est utilisé uniquement par les humains», a commenté Anna Bowland, première autrice de l’étude. Laquelle cite le comportement de certains insectes, notamment les mouches à fruits, particulièrement adaptées à un environnement alcoolisé: les mâles se tournent vers l’alcool lorsqu’ils sont rejetés comme partenaires, tandis que les femelles d’une espèce proche deviennent «moins exigeantes» et ont des relations sexuelles avec davantage de mâles après avoir bu. Des comportements qui ne sont finalement pas si différents des êtres humains…

   A.C. Bowland, Trends in Ecology & Evolution, 2024

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