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Thibault GRANDJEAN • grandjean.thibault@gmail.com

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Debout pour la science

Le 7 mars dernier, des milliers de scientifiques ont défilé dans les rues de nombreuses villes du monde avec le mot d’ordre: Stand Up for Science. Il faut dire que depuis le retour de Donald Trump à la Maison Blanche le 20 janvier dernier, la science et la recherche subissent un assaut sans précédent. Tout a commencé dès les premiers jours de l’investiture. Entre le 20 et le 22 janvier, près de 8 000 pages Internet ont disparu des sites officiels des grandes institutions du pays, comme le Center for Disease Control and Prevention (CDC), qui a à la fois une mission de santé publique d’information et de surveillance et prévention des maladies, ou la Food and Drug Administration, l’autorité de contrôle des médicaments et des aliments. Parmi les informations disparues: des pages de prévention contre les infections sexuellement transmissibles, des guides pour mener des essais cliniques plus inclusifs, ainsi que quantité d’articles scientifiques. Dans le même temps, près de 2 400 bases de données scientifiques, cruciales pour la conduite de la recherche, ont également disparu. Des décisions de justice ont exigé leur rétablissement, mais nombre des jeux de données remis en ligne ont été en réalité vidés de leur substance.

Après la suppression des pages est venue celle des postes. Là encore, toutes les grandes institutions sont touchées: le CDC a vu 750 de ses employés renvoyés. La FDA, entre 700 et 1 300. Le NOAA, centre fédéral de la météorologie et d’étude du climat, 2 000. Et 1 200 pour le National Institute of Health (NIH), qui finance la recherche biomédicale. Les conséquences de ces licenciements, associés à des coupes drastiques dans les budgets, ont un impact direct sur la recherche scientifique. Ce sont eux, en effet, qui attribuent les financements pour les recherches menées dans les universités. Plusieurs chercheurs ont ainsi vu leurs budgets brutalement diminués de 10 ou 20%, sans aucune justification. Les dépenses indirectes, comme celles liées à des participations à des congrès, ou aux équipements de recherche, ont également été drastiquement réduites.

Dans sa logique de lutte contre une science prétendument wokiste et privilégiant l’environnement aux vies américaines, enfin, l’administration Trump a même établi une liste de mots devenus interdits dans toute communication gouvernementale. Et toute demande de financement de recherche qui utiliserait ces mots se voit réexaminée. Parmi ces termes, les mots «femme», «sexualité», «équité», «transgenre», «crise climatique», ou encore «pollution».

Évidemment, toute cette pression contre la science et la recherche aux États-Unis ricoche sur le reste du monde. Par exemple, 23% des études scientifiques sur le changement climatique comptent au moins un scientifique établi outre-Atlantique, et la moitié du réseau mondial d’observation océanique est fait d’équipements américains. Et avec le licenciement de la directrice scientifique de la NASA, c’est le prochain rapport du GIEC qui devient incertain, alors même que l’agence spatiale américaine est un organisme indispensable pour l’observation de la Terre.

Face à ce rouleau compresseur mené par Donald Trump et Elon Musk, certains gouvernements et universités européennes souhaitent accorder une forme d’asile aux chercheurs américains qui en feraient la demande. Mais les simples citoyens peuvent également apporter leur aide. En effet, après les institutions américaines, Elon Musk a décidé de porter ses attaques contre Wikipédia. Le milliardaire accuse régulièrement l’encyclopédie participative d’être trop partiale et à gauche, ce que les chercheurs spécialistes de l’encyclopédie ont réfuté. En réaction, certains scientifiques appellent les citoyens à soutenir Wikipédia qui, si elle n’est pas parfaite, n’en est pas moins l’un des derniers espaces non-marchands du Web et dédié à la connaissance.

Avant de rendre l’antenne face à la pression de Donald Trump contre sa chaîne, le journaliste de CNN Jim Acosta a déclaré: «Il n’y a jamais de bon moment pour s’incliner devant un tyran. Accrochez-vous à la vérité. Ne cédez jamais aux mensonges.» Un slogan pour les 4 prochaines années.

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L’ACTU DES LABOS

Les œstrogènes naturels plus sûrs

La pilule contraceptive féminine a subi plusieurs évolutions de sa composition chimique, depuis son invention dans les années 1960. De nombreuses formules sont aujourd’hui présentes sur le marché, mais on en retrouve principalement deux grands types: celles composées uniquement de progestérone, et celles où cette dernière est utilisée en combinaison avec l’œstrogène. Au cours des 4 générations de pilules qui se sont succédé, l’hormone progestative a subi plusieurs changements, au contraire des œstrogènes, dits synthétiques, qui sont utilisés depuis le départ. Cependant, depuis quelques années, des pilules composées d’œstrogènes dits naturels, c’est-à-dire chimiquement identiques aux hormones féminines, sont disponibles sur le marché. Une équipe de chercheurs de l’UNamur, en analysant les effets secondaires rapportés à travers l’Europe, vient de démontrer que ces nouvelles pilules présentent jusqu’à 6 fois moins de risques de thromboses par rapport aux autres. Il s’agit d’une donnée importante pour la sécurité des femmes et les autorités de santé, alors que ces nouvelles contraceptions sont beaucoup plus chères que les précédentes. 

   Didembourg, Marie et al. Contraception, 2025

03

Prévoir les éruptions volcaniques grâce à l’IA

Les éruptions volcaniques sont notoirement difficiles à prévoir. Celles-ci sont bien précédées de signes avant-coureurs, comme des tremblements de terre, mais leur fréquence et leur intensité sont spécifiques à chaque volcan. Autrement dit, si la science a permis de prédire de façon efficace certaines éruptions par le passé, comme celle du Bárðarbunga en Islande en 2014 et celle de La Soufrière, en 2021, les données manquent pour quantité de volcans qui n’ont pas ou peu connu d’éruption dans les années récentes. Une équipe de l’ULB cherche à pallier ce problème en utilisant l’intelligence artificielle pour tenter de déchiffrer les signes avant‑coureurs de volcans qui ont été peu actifs au cours du 20e siècle. Comment ? Tout d’abord, il faut savoir que les volcans sont classés par type. On parle ainsi de volcan de type hawaïen, ou strombolien. En entraînant l’IA sur des données provenant de 41 éruptions, provenant de 24 volcans au cours de près de 75 ans, leur modèle d’IA a montré que les volcans d’un même type partagent effectivement des signes avant-coureurs similaires. Ces résultats pourraient permettre d’améliorer les systèmes de prévention et de diminuer les risques pour les populations humaines.

    Alberto Ardid et al. Nature Communications, 2025

Vue aérienne du Bárðarbunga lors de son éruption en septembre 2014.

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Place au PhenoTram

Mettre au point et sélectionner de nouvelles variétés de plantes qui puissent répondre à différents critères comme la résilience face aux aléas climatiques, ou pour diminuer l’utilisation d’intrants chimiques, est une tâche complexe. Car pour cela, il faut être capable de déterminer le phénotype de chaque plante, c’est-à-dire des caractéristiques telles que sa hauteur, la surface totale des feuilles, ou encore leur couleur. Et ce en présence de différents stress, comme la sécheresse ou la pollution. Pour cela, l’ULiège s’est dotée d’un outil dernier cri, le Traitfinder, surnommé le PhénoTram: composé à la fois de capteurs LIDAR et de caméras multispectrales, il peut détecter tant la lumière visible que l’infrarouge. Monté sur un rail (d’où son surnom), cet outil est capable de capturer des images 3D à haute précision de chaque plante, sous forme de nuages de points, de calculer automatiquement de nombreuses données, comme la biomasse, et de rendre automatiquement visibles certaines informations, invisibles à l’œil nu, sur la santé des plantes. Ce dispositif, unique en Belgique, est déjà mobilisé sur des projets de recherches concernant la pollution des sols, notamment aux PFAS, et la revalorisation des friches industrielles.

    phenospex.com

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Une détection spectaculaire de neutrino

Record battu ! Le télescope installé au fond de la Méditerranée par le groupe de recherche KM3NeT, auquel participe l’UCLouvain, a capté la plus énergétique des particules élémentaires à ce jour, un neutrino. Ces particules élémentaires sont particulièrement difficiles à observer: le neutrino n’a presque pas de masse, va quasiment à la vitesse de la lumière, et surtout, n’interagit que très faiblement avec la matière. Pourtant, elles sont les deuxièmes particules les plus abondantes de l’Univers. Cent milliards en provenance du Soleil traversent chaque centimètre carré de notre peau toutes les secondes. Si ce n’est pas la première fois que des chercheurs détectent un neutrino, c’est la première fois qu’il atteint une telle énergie. Il représente une nouvelle preuve de la possibilité d’observer l’Univers avec des neutrinos, apportant des informations complémentaires à celles obtenues par la lumière. Dans les prochaines années, le télescope KM3NeT se révèlera essentiel pour mieux comprendre l’origine des neutrinos astrophysiques et les phénomènes au sein des objets les plus extrêmes de notre Univers. 

   The KM3NeT Collaboration, Nature, 2025

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Régime cétogène contre Alzheimer

Lorsqu’un individu se prive de sucre, le corps commence à utiliser les protéines comme source principale d’énergie. Ces dernières sont utilisées pour produire des corps cétogènes, d’où tire son origine le régime du même nom. Or, si ce dernier a été initialement créé pour traiter les problèmes d’épilepsie, des recherches récentes montrent qu’il pourrait également lutter contre les principaux symptômes de la maladie d’Alzheimer. En effet, ces derniers sont causés par une accumulation de plaques amyloïdes dans les cellules du cerveau, ainsi que par un déficit du métabolisme du glucose. Les corps cétoniques viennent alors pallier ce déficit, et des études montrent également une diminution des plaques amyloïdes. Afin de tester plus avant cette hypothèse, une chercheuse de l’UMons vient de recevoir 300 000 € de la part de la fondation Stop Alzheimer pour explorer la voie de ce régime spécifique dans la prévention et le retard des symptômes de la maladie. En 2023, avec plus de 55 millions de personnes atteintes et près de 10 millions de nouveaux cas par an, selon l’OMS, la maladie d’Alzheimer est une des pathologies les plus coûteuses pour les sociétés occidentales.

    www.umons.be

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En bref

Les poumons sont un site fréquent de métastases cancéreuses, sans que l’on en connaisse réellement la raison. Une équipe de l’ULiège a mis en évidence l’abondance d’aspartate au niveau du milieu cellulaire pulmonaire, un acide aminé indispensable à la formation de protéines. Les chercheurs ont montré que la présence de cette molécule entraîne une cascade de réactions qui seraient à l’origine de l’agressivité des métastases.

   Ginevra Doglioni, et al. Nature, 2025
 

Le F.R.S.-FNRS vient de lancer PeriScops, une plateforme innovante qui centralise les références des publications disponibles sur les répertoires scientifiques institutionnels des cinq universités de la Fédération Wallonie-Bruxelles (FWB). Son but est d’accroître la visibilité de la recherche et offrir un accès facilité aux publications scientifiques à l’échelle mondiale.

 
La PME Cerhum, spécialisée dans le développement de greffons osseux imprimés en 3D et composés de céramique, va à nouveau collaborer avec l’UMons dans le cadre du projet I3iDENT. Ce dernier vise à créer de nouveaux matériaux pour les greffons intra-oraux, utilisés en dentisterie. La recherche est financée par le programme Win2WAL, pour un budget total de près d’1 million d’euros.

 
Les séjours dans l’espace atrophient progressivement le cœur. Il y a quelques années, une équipe de chercheurs de l’ULB avait mis au point une technique non invasive permettant de surveiller par sismocardiographie la santé cardiaque des astronautes. Aujourd’hui, cette technologie fait l’objet d’un essai clinique à l’Hôpital des enfants Reine Fabiola, afin de dépister de façon précoce des malformations cardiaques chez les jeunes patients.

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L’ACTU DE L’INNOVATION

Une première mondiale à l’UZ Brussel

Les traitements médicaux comme la chimiothérapie peuvent être lourds de conséquences. Administrés à de jeunes garçons, ils peuvent détériorer les cellules souches à l’origine des spermatozoïdes et ainsi engendrer une stérilité. En effet, bien que les testicules ne produisent pas de spermatozoïdes avant la puberté, les cellules souches y sont déjà présentes. Depuis 2002, l’UZ Brussel propose déjà de prélever du tissu testiculaire, hébergeant les cellules souches, aux jeunes patients devant subir ce type de traitement, afin de préserver leur fertilité ultérieure. Ce dernier est alors congelé dans de l’azote liquide à -196°C. Désormais, et pour la première fois dans le monde, l’hôpital a réussi une autogreffe de tissu testiculaire sauvegardé il y a plusieurs années. Quatre fragments de tissu testiculaire ont été replacés dans le testicule et quatre fragments dans le scrotum. Cette technique vise à garantir que le corps de l’homme commence à produire de lui-même des spermatozoïdes. D’ici un an, les chercheurs sauront si la greffe a été un succès avec une production normale de spermatozoïdes. Cependant, ces derniers ne pourront être expulsés par voie naturelle, les greffons n’étant pas reliés au canal déférent. En cas de désir d’enfant, l’homme devra avoir recours à une procréation médicalement assistée. 

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Bientôt un médicament pour l’AVC hémorragique

Dans un cas sur cinq, les accidents vasculaires cérébraux (AVC) sont dus non pas à un caillot qui bloque l’irrigation cérébrale, mais par une déchirure de la paroi de l’artère qui entraîne un saignement dans le cerveau. Malheureusement, 40% des décès après un AVC sont dus à un AVC hémorragique, et les survivants en gardent souvent des séquelles importantes, comme un handicap permanent. La société pharmaceutique Bioxodes développe actuellement une molécule, développée à partir d’une protéine présente dans la salive des tiques, qui permet de réduire la formation de caillots sanguins après un AVC hémorragique, tout en réduisant l’inflammation au niveau du cerveau. Cette substance a ainsi pour but d’inhiber les effets secondaires dévastateurs d’un AVC hémorragique. Actuellement en phase clinique, le traitement de Bioxodes a reçu la désignation de médicament orphelin à la fois par les autorités de régulation américaine et européenne. Ce statut devrait permettre d’accélérer le développement et l’approbation du futur médicament. 

    bioxodes.com

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Un assistant vocal pour les maisons de repos

En maison de repos, alors que le temps accordé à chaque patient diminue, celui dévolu aux tâches administratives augmente. 30 à 50% du temps de travail des soignants y est consacré. Pour y remédier, la start-up Kando a développé un assistant vocal, sous forme de box connectée à un téléviseur, commandable par la voix. L’assistant permet au soignant d’afficher sur le téléviseur le parcours de soins du patient, des données comme la température, la tension ou la médication, mais aussi de valider certaines tâches, tout cela sans les mains et donc sans cesser de communiquer à son patient et de lui prodiguer des soins. Kando fournit également un bouton d’alerte pour le patient qui peut l’activer à tout moment, et communiquer vocalement avec les soignants. Toutes les données médicales sont stockées dans l’environnement sécurisé de Kando, et la start-up ambitionne de perfectionner son système pour nourrir un algorithme prédictif. En fonction de l’historique médical du patient, l’assistant devrait à terme être capable d’anticiper et d’alerter sur certains problèmes de santé, comme les risques de déshydratation ou d’infections urinaires. Disponible uniquement pour la Wallonie, Kando prévoit bientôt une version néerlandophone. 

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Première pose en Belgique d’un pacemaker chez un nouveau-né

Pour oxygéner efficacement l’intégralité de notre corps, il est impératif que notre cœur ait un rythme normal, et une synchronisation parfaite entre ses différentes cavités: les oreillettes et les ventricules. Chez un individu sain, cette synchronisation est assurée par des fibres nerveuses. Mais il arrive que ces fibres soient défectueuses, entraînant le ralentissement, voire l’arrêt du rythme cardiaque. On parle alors de bloc atrioventriculaire. Une telle pathologie, lorsqu’elle est congénitale, est très rare. Malheureusement, elle a des conséquences importantes pour les nourrissons qui en sont atteints. Pour la première fois en Belgique, une équipe des cliniques Saint-Luc a posé sur un nouveau-né et immédiatement après sa naissance, un micro pacemaker sur-mesure, de la firme Medtronic. Ce dispositif permet de diminuer le temps d’hospitalisation, évitant de recourir à d’autres alternatives. Cette implantation, qui n’a été réalisée qu’une cinquantaine de fois à travers le monde, est une véritable réussite: le rythme cardiaque de l’enfant est désormais normal. 

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Un routeur circulaire

On estime à 200 millions le nombre de smartphones jetés chaque année en Europe. Pourtant, les composants de ces appareils sont conçus pour durer, et leur recyclage est particulièrement difficile. Une start-up belge, Citronics, a développé une technique afin d’extraire les composants d’anciens smartphones, comme la carte-mère, afin d’en faire des micro-ordinateurs destinés à gérer des équipements de domotique, comme des pompes à chaleur ou des caméras de surveillance. De plus, l’entreprise a présenté au World Mobile Congress de Barcelone, la grande messe du smartphone, une première mondiale: le NeoCircuit Router. Ce dernier est un routeur ADSL circulaire, dont les composants sont, là encore, issus à 70% de smartphones en fin de vie. Conçu pour Deutsche Telekom, il devrait à terme équiper les clients de ce dernier qui n’ont pas besoin de coûteuses connexions à la fibre. Citronics travaille notamment avec l’entreprise Fairphone, connue pour ses smartphones durables et démontables, qui lui fournit ses anciens modèles, des Fairphone 2. Cette dernière a d’ailleurs lancé un programme de récupération de smartphones afin d’en récupérer les métaux et terres rares. 

    Recyclez votre ancien téléphone !

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L’IMAGE DU MOIS

Les constructions humaines pèsent désormais plus que la biosphère, c’est-à-dire la totalité des êtres vivants sur Terre.

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En bref

La Wallonie compte désormais 21 «Factories of the Future». Ce titre récompense les entreprises qui investissent dans la digitalisation, les processus intelligents, ou des produits durables. Parmi les nouveaux lauréats, Safran Blades, un nouveau site industriel produit des aubes de compresseur en titane, Knauf Insulation, fabricant de matériaux d’isolation, ou encore l’entreprise de biotechnologies UCB.

 
Le Réseau wallon PAC et le Service Public de Wallonie ARNE, ont mis sur pied la plateforme Walakis, afin de connecter et renforcer les échanges de connaissances entre les acteurs du monde rural wallon. Cette plateforme permettra de mieux partager les innovations dans les domaines de l’agriculture, de la sylviculture et du développement rural. 

    walakis.be

 

La start-up H2WIN travaille à la mise au point d’un dispositif capable de produire de l’hydrogène propre. Au lieu d’utiliser des catalyseurs coûteux, comme le platine, l’entreprise cherche à s’inspirer de la nature et à utiliser des enzymes, plus faciles à produire localement.

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INTERVIEW

Dépasser les chatbots

La manière dont les larges modèles de langage (LLM), à l’origine des chatbots actuels comme ChatGPT, apprennent le langage n’a rien à voir avec celle d’un être humain. Et si ce n’était pas une fatalité ? Katrien Beuls, Professeure à l’UNamur, a récemment publié une étude qui apporte un nouvel éclairage.

Quelles sont les différences entre l’apprentissage par une machine et par un humain ?

Il y a tout d’abord une question de taille. ChatGPT 3 a été entraîné sur 3 milliards de mots ou expressions. Par comparaison, un enfant est exposé à 60 millions de mots à l’âge de 5 ans, et 200 millions à l’âge de 20 ans. Mais cette comparaison n’a pas beaucoup de sens, car l’être humain apprend lorsqu’il est en interaction avec son environnement. Nous sommes sans cesse en train de faire des hypothèses sur le monde qui nous entoure. Et lorsque nous testons ces hypothèses, nous développons notre langage.

Qu’avez-vous montré dans votre étude ? 

Dans nos expériences, nous mettons des agents, en l’occurrence des petits robots, dans le contexte d’une chambre avec des objets. Et ils doivent communiquer entre eux pour accomplir une tâche simple, comme ouvrir une porte, ou ranger un objet. Et rapidement, on observe qu’une forme de langage se met alors en place, avec des signaux qui correspondent à des mots. Cela montre que, dans un contexte évolutif, une forme de langage apparaît. 

Quelle est la portée de vos travaux ?

Nous sommes bien sûr très loin des LLM, mais on voit là l’émergence d’un langage robotique inspiré de l’évolution du langage humain. Et ce, de façon beaucoup plus rapide que dans l’entraînement d’un chatbot parce qu’il y a ici une réaction de l’environnement, qui est à la fois beaucoup plus riche et plus contraint. Or, je pense que si nous souhaitons un jour communiquer avec des machines, et les rendre plus humaines, il est indispensable d’aller vers ce type de systèmes. 

   K. Beuls et al. Computational Linguistics, 2024

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DATA

+ 1,75 °C

C’est une surprise de taille, et une très mauvaise nouvelle dans la lutte contre le changement climatique. Alors que les années 2023 et 2024 ont été anormalement chaudes, notamment en raison du phénomène El Niño, les climatologues s’attendaient à ce que les températures redescendent quelque peu, avec l’arrivée de son opposé, La Niña. Il n’en a rien été: le mois de janvier 2025 a été le plus chaud jamais enregistré, avec une moyenne de 13,23 °C, selon l’institut européen Copernicus. Si ce chiffre est bien au-delà de l’objectif 1,5 °C de l’accord de Paris, il faut cependant voir ce dernier sur le long terme. À l’heure actuelle, les scientifiques estiment que le climat s’est réchauffé de 1,3 °C depuis l’ère pré-industrielle. Et ils estiment que la barre symbolique de 1,5 °C sera franchie entre 2030 et 2035.

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COUP D’CRAYON

   Olivier Saive

Pas besoin de pelleteuses quand on a des castors ! Il y a une quinzaine d’années, en République tchèque, à une soixantaine de kilomètres au sud-ouest de Prague, les États-Unis avaient créé un vaste site militaire, avec dans l’idée d’y installer un système radar pour le bouclier antimissile de l’Europe. Mais finalement, le projet n’a jamais vu le jour, et le site, dégradé, a été laissé à l’abandon. Depuis plusieurs années, l’État tchèque y envisageait un projet de revitalisation, avec la création de plusieurs plans d’eau. Mais les discussions ont pris du retard, notamment en raison du coût, estimé à 1,2 million d’euros. Et finalement, aucun centime n’aura été déboursé: un groupe de castors, «pas plus de 6 ou 8 individus», ont créé plusieurs barrages et ainsi restauré en seulement 3 ans l’écosystème naturel de la région. L’animal, protégé en Tchéquie, est ainsi considéré par de nombreux scientifiques comme un réel ingénieur de l’environnement qu’il est important de préserver.

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