L'Adn de…

Cécile GERIN Muséologue

Propos recueillis par Géraldine TRAN • geraldine.tran@spw.wallonie.be

© IRScNB-KBIN T.Hubin

C’est plutôt un heureux «hasard». En fait, j’avais un contrat de recherche FNRS mais j’avais aussi cette envie de partager avec le public «non expert». J’ai d’ailleurs passé l’agrégation pour enseigner. Mais ma collaboration au Festival Science infuse m’a permis de me rendre compte que j’avais plus envie de transmettre que d’enseigner. Alors quand le musée m’a proposé 3 mois de contrat pour documenter le contenu scientifique d’une exposition, j’ai dit oui. Je pensais rendre service sans me rendre compte que c’était un «vrai» job ! LE job, celui grâce auquel je suis en contact avec le public et qui me permet de garder un lien avec la science. Ce n’est pas pour rien que 17 ans plus tard, j’y suis encore. 

Muséologue, c’est une vocation que vous avez depuis toute petite ? Comment l’idée d’exercer ce métier vous est-elle venue ? 

Comment devient-on muséologue ?

Je suis ingénieure agronome au départ, ­spécialisée dans les maladies des plantes. J’ai surtout appris «sur le tas». Même si, alors que je travaillais déjà au Museum, je suis allée suivre un cours de muséologie à Paris. En Belgique, il y a une formation à l’Université de Liège, avec stage pratique. Il existe aussi des cursus très pointus à Laval (Canada) ou aux Pays‑Bas. De mon expérience, pour travailler dans un musée des sciences naturelles, un bon bagage en sciences est en tous cas idéal. De même qu’une bonne capacité à «simplifier» un contenu scientifique sans en perdre la rigueur et la justesse.

Tout dépend de l’étape du projet. Les journées sont variées et enrichissantes durant tout son développement: choix des thématiques, rencontres avec des scientifiques, lectures, visites dans d’autres musées, écriture du scénario, discussions avec des responsables de collections, des taxidermistes, élaboration du contenu et fabrication, etc. Beaucoup moins variées et créatives sont les journées administratives de rédaction des cahiers des charges pour les marchés publics. Quant aux journées (ou plutôt mois !) d’installation sur site, elles sont plutôt diversifiées, fatigantes mais aussi stimulantes car elles annoncent l’ouverture imminente au public. C’est une étape que j’adore, même si elle est stressante. La date d’ouverture est fixée 1 an à l’avance, il faut être prêt. C’est l’aboutissement d’un long processus: une expo temporaire demande environ 18 mois de préparation; les permanentes, 4 ans… 

Vous travaillez actuellement comme chargée de projet au Museum des Sciences naturelles, mais quelle est votre journée-type ?

Quels sont vos rapports avec la science ? Quels sont vos premiers souvenirs «scientifiques» ?

Ce qui est sûr, c’est que je n’ai pas aimé les cours de sciences (chimie, physique) durant mes secondaires. Mais j’ai toujours eu un attrait pour la biologie, le vivant. Mon papa était vétérinaire, je me souviens des visites dans son labo ou de ses dissections. Il a toujours été curieux de tout et nous a transmis cette curiosité et cette volonté de comprendre le fonctionnement des choses et des êtres. D’ailleurs, sur 6 enfants, 5 sont scientifiques ! Ça ne peut pas être totalement hasardeux…

À l’heure actuelle, il s’agit de la lourdeur des démarches administratives. Notamment, comme je le disais, toutes ces procédures relatives aux marchés publics. Ça casse un peu la créativité ! Mais je comprends que des règles et des procédures soient nécessaires.

Quelle est la plus grande difficulté rencontrée dans l’exercice de votre métier ? 

Quelle est votre plus grande réussite professionnelle jusqu’à ce jour ?

Depuis plus de 10 ans maintenant, le musée est engagé dans un vaste programme de rénovation des salles permanentes. La Galerie des Dinos, la Galerie de l’Évolution ou encore celle de l’Homme… Les espaces sont superbes et les expos sont de qualité. Et ça plaît ! La fréquentation du public est là pour en attester. Nous pouvons être fiers de notre travail. À titre personnel, je suis très heureuse d’avoir réalisé 2 expos temporaires «blockbusters» partout où elles ont été présentées: «Meurtre au musée» (le directeur avait demandé lui-même à être la victime) et «Bébés Animaux» (pour les petits qui ne lisent pas encore). 

Créer une exposition, c’est un processus long et complexe, faisant appel à de nombreux métiers. Créativité, polyvalence, patience, persévérance, communication, esprit d’équipe, coordination sont très utiles. Et puis … croire à ce qu’on fait !

Quels conseils donneriez-vous à un jeune qui aurait envie de suivre vos traces ?


Cécile Gerin

Âge

49 ans

Situation Familiale

Célibataire

Profession

Chargée de projet au Museum des Sciences naturelles

Formation

Secondaires générales. Ingénieur agronome (section phytopathologie) et doctorat en sciences agronomiques et ingénierie biologique à l’UCL. 

Adresse

Rue Vautier, 29 à 1000 Bruxelles.

Tél.

+ 32 (2) 627 45 30

Mail cecile.gerin@sciencesnaturelles.be

La Galerie de l’Évolution

Cécile dans l’Expo « Bébés Animaux »

J’aurais envie de dire fleuriste car offrir et recevoir des fleurs, c’est du bonheur ! Mais je ne suis pas favorable aux fleurs coupées ni aux conditions de leur production. Sinon, volcanologue m’aurait plu. Ça rassemble mon goût du voyage, la curiosité, la persévérance, l’observation, l’appel aux disciplines scientifiques. Mais les places sont plutôt rares.

Je vous offre une seconde vie, quel métier choisiriez-vous ?

Je vous offre un super pouvoir, ce serait lequel et qu’en feriez-vous ? 

Voler… pour la liberté de mouvement, l’absence de contraintes, l’espace, la beauté. Ou nager sous l’eau sans bouteille. Pour les mêmes raisons.

Si je dois donner un cours, je pense que j’essaierais de partager ma passion pour le vivant. Et idéalement avec des enfants qui sont encore curieux, créatifs et plein d’énergie. 

Je vous offre un auditoire, quel cours donneriez-vous ?

Je vous offre un laboratoire, vous plancheriez sur quoi en priorité ?

La revalorisation des déchets, le recyclage, une production moins polluante. 

Un crayon… Parce que ce n’est pas un objet connecté, que c’est un outil simple et efficace et aussi, parce qu’il laisse une trace. Je me rends compte d’ailleurs que derrière ce choix, on retrouve une ligne conductrice qui est la transmission. 

Je vous transforme en un objet du 21e siècle, ce serait lequel et pourquoi ?

Je vous offre un billet d’avion, vous iriez où et qu’y ­feriez-vous ?

Si le billet le permet: le tour du monde, à la ­rencontre d’autres manières de vivre et de penser. Sinon, je reviens d’un séjour en Nouvelle Calédonie et j’y retournerais bien…

De manière générale, j’aime rencontrer des personnes passionnées, engagées. De manière ­particulière, j’aurais aimé rencontrer le couple de volcanologues Maurice et Katia Krafft. Ou Alexandra David-Nell, cette grande exploratrice orientale et écrivaine – décédée à 101 ans ! J’admire la liberté qu’elle a prise et qu’on lui a donnée à une époque où les femmes étaient plutôt cantonnées à des rôles domestiques. 

Je vous offre un face à face avec une grande person­nalité du monde, qui rencontreriez-vous et pourquoi ?

La question «a priori»: créer une expo, facile ! C’est comme faire de la déco, il suffit de remplir l’espace et que ce soit joli !

Bien sûr: il suffit de choisir un bon décorateur ­d’intérieur. Plus sérieusement, une exposition ­permet de présenter une thématique. Elle repose sur un fil conducteur et des choix en découleront. Par exemple, l’ambiance, la scénographie, les ­collections qui soutiennent le propos. C’est aussi diversifier les moyens d’interactions avec le visiteur, attiser sa curiosité, écrire des textes accessibles à tous et justes scientifiquement. Le tout, dans des salles à l’architecture parfois contraignante et/ou inspirante.

Share This