L'Adn de…

Pierre-Olivier
CHARLE 
Thanatopracteur

Propos recueillis par Nadine Sahabo • nadinesah@yahoo.fr

P.-0. CHARLE

Thanatopracteur, c’est une vocation que vous avez depuis tout petit ?

Pas du tout… Après mes études de marketing, je suis arrivé dans le domaine funéraire via ma belle-famille. Tout en travaillant comme pompe-funèbre dans l’entreprise familiale, j’ai eu l’opportunité de suivre la formation de thanatopracteur. La passion pour ce métier est arrivée au fur et à mesure de ma formation et de la pratique.

En Belgique, cette formation est dispensée via celle de «Chef d’entreprise» organisée par les centres IFAPME en collaboration avec l’Institut Belge de Thanatopraxie. Elle dure 2 ans à raison de 2 soirs par semaine et 4 semaines de stage à l’étranger (France, Canada) par an. Ces stages sont primordiaux pour acquérir de la pratique. Cette formation est réservée essentiellement aux personnes déjà diplômées en pompe-funèbre ou justifiant une certaine expérience dans le milieu funéraire.

Comment devient-on thanatopracteur ?

Vous travaillez actuellement comme pompe-funèbre et formateur en thanatopraxie, mais quelle est votre journée-type ?

Comme la plupart des thanatopracteurs qui exercent en Belgique, je suis polyvalent dans le milieu du funéraire. Les conditions de travail varient en fonction des aléas de la mort et ont donc un impact sur notre mode de vie. La profession exige souvent que les thanatopracteurs ou les pompes funèbres travaillent à toute heure du jour ou du soir, les weekends et les jours fériés. En fonction des décès, mes journées sont rythmées entre l’accueil des familles, les services de funérailles, les formalités et démarches auprès des différents intervenants et bien-sûr les soins d’hygiène, de présentation et de thanatopraxie sur les défunts. Le temps que j’octroie à la formation se résume à un soir de cours par semaine et surtout, au suivi des étudiants lors des stages pratiques que ce soit en Belgique ou à l’étranger.

Au départ, le domaine scientifique ne m’avait jamais particulièrement attiré. Mes premiers rapports avec la science ont vraiment débuté quand j’ai entamé les études de thanatopracteur. L’anatomie, l’histologie, la microbiologie, la toxicologie mais aussi quelques notions de médecine légale sont des matières importantes. Je me suis vite aperçu que l’exercice de la thanatopraxie demandait un bon esprit d’analyse et des aptitudes scientifiques. Sans cela, le thanatopracteur appliquerait bêtement des recettes, ce qui pourrait l’empêcher de chercher des solutions adaptées aux différents cas spécifiques qui peuvent parfois se présenter.

Quels sont vos rapports avec la science ? Quels sont vos premiers souvenirs «scientifiques» ?

Quelle est la plus grande difficulté rencontrée dans l’exercice de votre métier ?

Je pense qu’il y en a plusieurs et à divers niveaux. Pouvoir gérer ses émotions et prendre le recul nécessaire dans certains cas plus particuliers comme le décès d’un enfant ou d’une jeune personne n’est pas toujours évident. Une autre difficulté est de faire en sorte de pouvoir appliquer dans tous les cas le  meilleur traitement possible. Si nous n’avons
pas une obligation de résultats, nous avons une obligation de moyen et s’il est une qualité importante pour avoir du succès dans cette profession, c’est bien la persévérance. Le traitement des cas difficiles exige souvent une ténacité que tout le talent du monde n’arriverait pas à compenser.

À chaque fois qu’une famille nous remercie de lui avoir permis de se recueillir dignement auprès de son défunt, c’est une réussite. Lorsque l’on peut rendre une image décente, digne et présentable à un autopsié, un accidenté, à une personne décédée des suites d’une cause violente ou d’une maladie ayant laissé certains stigmates, c’est également une réussite. Bien-sûr certains décès ou événements marquent plus que d’autres… La «restauration» (comme l’on dit dans notre jargon)des défunts décédés lors de la catastrophe de Buizingen ou des attentats de Bruxelles en 2016, et qui a permis leur identification auprès des familles restera pour ma part gravée à jamais. 

Quelle est votre plus grande réussite professionnelle jusqu’à ce jour ?

Quels conseils donneriez-vous à un jeune qui aurait envie de suivre vos traces ?

Le milieu de la mort intrigue et suscite beaucoup de vocations. Généralement, je conseille aux jeunes intéressés par ce métier de bien s’informer de sa réalité sur le terrain. S’ils sont motivés, je leur suggère de suivre une formation en Pompe-Funèbre et de se familiariser au milieu funéraire avant de s’embarquer dans une voie qui ne leur convient pas.

  


Pierre-Olivier CHARLE

44 ans

Situation familiale

marié, 2 enfants

Profession

Pompe-funèbre (Les Funérailles Borgno),
Thanatopracteur, Fournisseur de matériel de Thanatopraxie (Inter-Thanato),
Formateur en Thanatopraxie




Formation 

Gradué en marketing, Thanatopracteur

Tél.: + 32 475 31 34 32

Mail : pocharle@interthanato.be

Je vous offre une seconde vie pour un second métier…

Je ne me vois pas faire autre chose que travailler dans le milieu du funéraire… Ceci dit, je suis toujours admiratif du corps médical dans son ensemble ainsi que de tous ces professionnels qui travaillent aux services des enfants et jeunes en difficultés, que ce soit dans des maisons et centres d’accueil, hôpitaux, associations ou autres…

Éradiquer tous les conflits provoqués par quelques dirigeants du monde au nom d’une religion, d’un territoire ou d’un profit et qui créent tellement de dommages collatéraux ! Mais il faudrait vraiment un super pouvoir.

Je vous offre un super pouvoir… 

Je vous offre un auditoire…

Ça m’éviterait de devoir en louer un pour l’organisation de notre congrès sur la thanatopraxie ! Avec l’Institut Belge de Thanatopraxie, on fait venir plusieurs conférenciers de renom dans ce domaine venant essentiellement des États-Unis et du Canada. Cela permet non seulement de découvrir de nouvelles techniques et procédés,  mais aussi de rencontrer et d’échanger avec des homologues venant de divers horizons.

Vu les nouvelles normes européennes sur l’utilisation du formaldéhyde, je tenterais de trouver LE fluide d’embaumement qui remplacerait tous les fluides actuels à base de formaldéhyde. Quelques distributeurs ont déjà tenté de trouver des alternatives mais peu de thanatopracteurs sont convaincus et il y a encore beaucoup de recherches et de progrès à effectuer en la matière…

Je vous offre un laboratoire…

Je vous transforme en un objet du 21e siècle…

Quand je vois le temps que l’on perd sur les routes et dans les moyens de transport, ce serait un drone.

J’adore voyager et rencontrer d’autres cultures et civilisations. J’ai une petite préférence pour les espaces montagneux… Je dirais au Népal pour découvrir la chaine de l’Himalaya.

Je vous offre un billet pour quelque part…

Je vous offre un face à face avec une grande personnalité du monde…

Nelson Mandela, homme de conviction, grand défenseur des droits de l’homme connu pour son humanisme qui a pu régler pacifiquement ce que beaucoup d’autres auraient tenté de régler avec des armes… Malheureusement, il n’est plus de ce monde.

Le croque-mort est plutôt l’ancêtre du Pompe-funèbre…Ce terme vient du fait que le pompe-funèbre croquait l’orteil d’un défunt pour s’assurer de son décès… Maintenant, il arrive régulièrement que des personnes souhaitent, de leur vivant, qu’on leur fasse un soin de conservation après leur décès afin d’être certain d’être bien mort avant la mise en bière. Vu sous cet angle, on pourrait nous considérer comme les «croques -morts» des temps modernes ! 🙂

La question «à priori»: un thanatopracteur est un croque-mort des temps modernes…

Share This