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Jean-Michel DEBRY • j.m.debry@skynet.be

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Un majestueux pygargue à tête blanche, l’emblème national des États-Unis.
Son envergure maximale varie de 179 cm pour le mâle à 243 cm pour la
femelle !

 
Du plomb dans l’aigle

Comme dans beaucoup d’autres pays, l’aigle est protégé aux États-Unis d’autant plus volontiers qu’il fait figure d’emblème national et politique. Cela n’empêche pas l’animal de «profiter» lui aussi des pollutions diverses. Il s’agit d’un prédateur exclusif qui se trouve au sommet de la pyramide alimentaire, ce qui signifie qu’il peut concentrer les polluants stables qui se sont déjà un peu accumulés dans les tissus de ses victimes, mais aussi à des niveaux inférieurs, notamment végétaux.

Les métaux sont à ranger parmi les polluants accumulés et des chercheurs ont voulu savoir ce qu’il en était pour le plomb. Ils ont fait porter leur étude sur les 2 espèces d’aigles les plus majestueux et représentatifs: l’aigle royal et le pygargue à tête blanche, l’emblème national. Des prélèvements de sang et de plumes ont été effectués sur 620 spécimens vivants, ainsi que sur des tissus additionnels (foie, os) d’animaux morts. Les résultats semblent sans appel, puisqu’on note un empoisonnement chronique chez 46% des spécimens étudiés, un empoisonnement aigu pour 27 à 33% des pygargues et 7 à 35% des aigles royaux, les variations étant imputables à la région habitée et à la saison. Une évaluation statistique de ces valeurs, couplée à d’autres observations de terrain, laisse à penser que le taux de croissance des populations de pygargues pourrait s’infléchir de 3,8% lors de chaque année à venir. Pour l’aigle royal, apparemment moins affecté, la réduction pourrait n’être que de 0,8%.

On aura compris que cela ne compromet pas l’augmentation souhaitée des populations de ces 2 icones américaines. Elle les réduit simplement. Mais c’est tout de même une réduction et cela ne vaut encore que pour le seul plomb. Qu’en est-il pour les pesticides et les autres polluants anthropogéniques ? C’est ce qui reste à préciser, pour les aigles mais aussi pour tant d’autres prédateurs, soumis à la même concentration pyramidale de poisons potentiels…

   Science, 2022. 375: 779-782

Tous les canaris sont-ils jaunes ?

Les oiseaux séduisent par au moins 2 de leurs qualités: le chant et la robe. Celle du mâle surtout. On sait que ce sont des arguments auxquels la femelle ne se montre pas insensible en période de rapprochements amoureux. Elle sait aussi faire la part des choses, pour certaines espèces (comme l’hirondelle), entre la taille des plumes de la queue et les aptitudes reproductives. Les canaris, eux, sont plutôt connus pour leur chant. Même si leur robe peut aussi revêtir des couleurs vives, dont le jaune semble être dominant. Mais la sélection très orientée des espèces peut mener à des hybrides aux couleurs nouvelles. Parmi les obtentions des éleveurs figurent des canaris blancs et rouges, le mâle étant davantage coloré que la femelle. Ils sont issus du croisement du chardonneret rouge du Venezuela (en réalité un tarin, comme le canari jaune) et du canari commun, uniformément jaune. C’est donc Spinus cucullatus x Serinus canaria. Le premier nommé est rouge foncé avec des marques noires sur les ailes, la tête et la queue (photo 1). Chez le mâle en tout cas; la femelle étant davantage dans des nuances de gris. Si on croise ce bel animal avec le canari jaune (celui des amateurs) (photo 2), on obtient en première génération (ce que les généticiens appellent la F1) des animaux hétérozygotes à la robe très largement rouge foncé, le caractère étant dominant. On peut ensuite croiser ce premier hybride un certain nombre de fois avec des canaris jaunes pour obtenir, après quelques générations, des individus «en mosaïque» blancs et rouges (photo 3); dont les couleurs sont plus marquées chez le mâle. Cette suprématie masculine en matière de coloration des plumes tient donc à une seul gène et plus précisément à son expression plus importante que celle de la femelle.

   Science 368: 1270-1274