Société

Aliments transformés:
faut-il les éviter ?

Anne-catherine De Bast

©VLAMMS INSTITUUT GEZOND
LEVEN 2017

Les «faux aliments» envahissent les magasins et les frigos. Transformés à l’extrême, certains d’entre eux seraient nocifs et sources de nombreuses maladies chroniques. Mais ces produits sont-ils pour autant tous synonymes de malbouffe ? À la Faculté des bioingénieurs de l’UCLouvain, on planche sur des solutions privilégiant la santé et le respect de l’environnement

Ils pullulent dans les rayons des super­marchés. Depuis les années 80, les aliments ultra transformés se sont multipliés. À tel point qu’ils atteindraient aujourd’hui jusqu’à 50% de l’offre proposée dans les grandes surfaces. Des «faux» aliments dissimulés parmi les «vrais» ? Nous en consommons tous les jours: céréales, yaourts, jus de fruits, soupes de légumes,… Des aliments réputés «sains», créés de toute pièce par l’industrie agroalimentaire, tellement transformés qu’ils en ont perdu une partie de leurs qualités nutritionnelles. Pour compenser, des additifs et des conservateurs y ont été ajoutés. Pour le Dr Anthony Fardet, chercheur en nutrition préventive et auteur du livre Halte aux aliments ultra transformés ! Mangeons vrai, on les reconnaît à la liste des ingrédients qui les composent, souvent interminable et incompréhensible pour le consommateur lambda.

Selon lui, l’objectif de l’industrie alimentaire serait ainsi de «fabriquer à bas prix des produits qui ressemblent à des aliments, qui ont le goût d’aliments… mais qui ne sont pas des aliments. Les ingrédients qui entrent dans leur composition proviennent de l’ultra transformation d’aliments bruts, ce qui me fait dire que nous n’avons jamais autant maltraité nos aliments qu’aujourd’hui. Ces produits ultra transformés sont des aliments non identifiés pour notre organisme. Ils sont à l’origine de l’explosion de l’obésité, du diabète et de toutes les maladies chroniques qui en découlent».

 
Décomposer et
ré-assembler

Ces produits sont issus d’un processus de réductionnisme, ou «cracking». Le principe consiste à décomposer des aliments en ingrédients qui, une fois assemblés, permettent de créer d’autres aliments. «Le réductionnisme a amené les technologues à fractionner les aliments puis à isoler des ingrédients pour les recombiner ensuite en ajoutant sel, matières grasses, sucres simples et de nombreux additifs, afin de leur redonner le goût, la couleur et la texture qu’ils ont perdus suite au procédé de fractionnement-recombinaison des aliments d’origine», explique Anthony Fardet.

Exemple: le blé peut être décomposé en farine blanche, germe, son, gluten, amidon de blé, amidon modifié de blé, sirop de glucose, dextrose… Avec ces ingrédients, «on a pu fabriquer du pain de mie complet: l’industriel prend de la farine blanche à laquelle il ajoute un peu de son et du gluten, précise le nutritionniste. Il reconstitue donc artificiellement la farine de blé complète. Il y ajoute de l’huile, du sucre, de la levure et le tour est joué». Inconvénient: les produits ainsi obtenus ont perdu leurs qualités nutritionnelles dans l’opération.

 
 
  

Même les jus de fruits sont parfois victimes d’une ultra-transformation. Le produit brut, disons une pomme, peut être transformé pour être consommé en compote ou en jus pressé, une transformation «saine», qui modifie néanmoins sa texture et donc son effet rassasiant. Mais on peut aussi trouver des jus industriels de légèrement transformés à ultra-transformés: ces derniers ont perdu leurs vitamines et minéraux et sont produits à base de concentré ou de poudre déshydratée à laquelle on ajoute de l’eau, du sucre et des additifs.

Cracking du blé.