Les
oiseaux qu’on met en cage, peuvent-ils encore voler ? 

Géraldine TRAN – Rédac’chef 

Le 11 février a été proclamée journée internationale des femmes et filles de sciences. Le 8 mars est celle dédiée aux femmes. Quant au 28 avril, elle mettra en lumière les jeunes filles dans les TIC (technologies de l’information et de la communication). Trois occasions de rappeler ici l’importance du rôle des femmes dans la société et dans ces domaines en particulier, où elles sont sous-représentées. Pourriez-vous d’ailleurs citer au moins un nom de femme scientifique célèbre dans chaque domaine de ce qu’on appelle les sciences dures ou les TIC ? Marie Curie ne compte pas, trop facile ! Si vous lisez Athena, vous devriez pouvoir trouver. Mais pour le grand public, ce n’est pas si évident. Et ce n’est pas étonnant lorsqu’on sait que les femmes représentent à peine 30% des chercheurs dans le monde. Étrange alors qu’elles sont plus nombreuses à s’inscrire dans les filières scientifiques et à obtenir un diplôme de master. C’est ensuite qu’elles s’effacent, à partir du doctorat. C’est ce que l’on appelle le phénomène du tuyau percé. Donc forcément, comment récompenser, médiatiser ou nommer des femmes à des postes clés s’il n’y en a (presque) pas ? Cela pourrait s’expliquer, entre autres, par l’effet Matilda, théorisé par l’historienne des sciences, Margaret W. Rossiter. Il s’agit du déni ou de la minimisation récurrente et systémique de la contribution des femmes scientifiques à la recherche, dont le travail est souvent attribué à leurs collègues masculins. Rosalind Franklin (voir rubrique Curiokids), en est un exemple flagrant. Bien qu’ayant obtenu la première photo de l’ADN et de sa structure en hélice, ce sont pourtant Dewey Watson et Crick qui obtiendront le Prix Nobel pour cette «découverte» (volée) en 1962. Scandaleux mais monnaie courante. Cet effet Matilda, tout comme les statistiques déséquilibrées des grandes récompenses scientifiques, ne sont en fait que le sommet de l’iceberg. Mes lectures à ce sujet m’ont amenée à me demander où et quand avait pris la racine du «mal». Dès que l’Homme (un terme bien choisi tiens) est né, j’imagine. Sans doute parce que le premier besoin vital étant de se nourrir/chasser, le mâle avait des capacités physiques plus adaptées. Par ailleurs, l’enfantement, qui incombe biologiquement à la femme, ne lui laissait pas d’autre choix que de porter et s’occuper des nourrissons. Une réalité qui est toujours là et qui, malheureusement, oblige encore les femmes à faire des choix (famille, carrière, régime de travail, expatriation…) et à subir des jugements sur leur vision de la maternité. Bref, je ne m’étends pas sur ce vaste sujet, mais de là sont nés les stéréotypes. Qui n’ont cessé de se renforcer au fil de l’Histoire, phagocytée par la masculinité et engendrant même une autocensure des femmes. C’est là que se trouve la clé pour continuer à faire évoluer les mentalités. Le cerveau n’a pas de sexe. Les femmes ont les mêmes capacités intellectuelles que les hommes. ENSEMBLE, ils ont un rôle majeur à jouer dans les sciences et dans la société. À nous, médias, d’offrir une diversité, d’éviter les idées reçues, de gommer les frontières, de lutter contre les discriminations, de rendre visibles de nouveaux modèles et de donner une place à tous et toutes, y compris dans les mots grâce à un langage inclusif. Pour conclure: oui, les oiseaux qu’on met un temps en cage peuvent encore voler ! C’est dans leurs gènes…  

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