Technologie

Le plastique, c’est (pas) fantastique ? 

(1e partie)

Virginie CHANTRY • virginie.chantry@gmail.com 

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Le 7 octobre dernier, GreenWin (1) et Plastiwin (2) notamment organisaient, à Namur, une journée de conférence dédiée à la circularité et à l’écoconception – soit le fait d’intégrer des critères environnementaux dès les prémices de la conception – des plastiques. Cet évènement s’inscrivait dans le cadre de la stratégie d’économie circulaire «Circular Wallonia» et de la démarche «Circular Design in Plastics». Fondamentaux, concepts clés et défis de la plasturgie circulaire sont quelques-uns des thèmes abordés au cours de ce colloque riche en informations et en échanges. Mais attardons-nous tout d’abord sur l’atome que l’on retrouve dans tous les plastiques, le carbone, et voyons ce qu’il a de si particulier

 

Le plastique fait partie intégrante de notre quotidien: vêtements, jeux, emballages, ustensiles de cuisine… On le retrouve partout. Savez-vous que le mot «plastique» provient du latin plasticus et du grec ancien plastikos qui signifie «relatif au modelage» ? En ce qui nous concerne, l’adjectif plastique fait référence à une propriété de la matière, celle d’être modelable, alors que le substantif désigne un matériau organique que l’on peut mouler, modeler en une forme particulière selon son usage. La circularité, idée selon laquelle rien ne doit être jeté, implique que tout produit en fin de vie doit entrer dans une nouvelle boucle économique ou dans un nouveau cycle de vie, défini comme l’ensemble des étapes par lesquelles passe un produit, de sa conception jusqu’à la fin de sa vie (incluant extraction des matières premières, production, distribution et utilisation notamment). Quant à l’économie circulaire, il s’agit d’un modèle consistant à limiter l’utilisation des ressources, la production de déchets et l’impact sur l’environnement au cours de ce cycle.

À l’heure actuelle, toutes les matières plastiques reposent sur la chimie du carbone, C en symbole chimique. S’il est vrai qu’utiliser cet atome pour créer des matériaux constituait un gage d’innovation dans les années 80, la tendance s’est complètement inversée depuis et le carbone semble avoir obtenu le statut «d’ennemi public numéro 1»: il faut décarboner à tout prix. Selon Aurore Richel, Professeure de chimie à l’ULiège sur le site de Gembloux Agro-Bio Tech et première experte intervenante de la journée dédiée à la plasturgie circulaire, il y a confusion. Dans la tête du grand public, carbone rime avec «pollution» et «fossile». C’est pourtant réducteur, le carbone étant au cœur de la chimie du vivant et de synthèse.

Back to basics

Quatrième atome le plus abondant dans l’Univers après l’hydrogène, l’hélium et l’oxygène, le carbone n’est pas très foisonnant sur Terre, où il occupe la 15e place. Mais il est indispensable à la vie sur notre planète. Il existe sous diverses formes en proportions différentes. La plus abondante (plus de 99,9%) est le carbone minéralisé emprisonné dans les roches (diamants, graphite) ou les sédiments et donc difficilement accessible. Ensuite, avec 0,05%, vient le dioxyde de carbone, ou CO2, issu de la respiration des êtres vivants et de la combustion des énergies fossiles. On le retrouve dans l’atmosphère mais également dans les plans d’eau sous forme dissoute. Le carbone fossile (charbon, gaz naturel, pétrole…) provient de tout ce qui est mort et est présent à hauteur de 0,003%. Enfin, le moins abondant avec 0,001% est le carbone renouvelable que l’on trouve dans tout ce qui vit (plantes, animaux, virus, organes, cheveux…). Et depuis quelques années, le carbone a également été identifié sous une 5e forme, celle de microparticules issues de la décomposition des matières plastiques en fin de vie se répandant dans l’environnement. On ignore encore comment ce nouveau réservoir affecte les autres. En effet, le carbone circule sous ses diverses formes entre l’air, l’eau, le sol, les êtres vivants… On parle de «cycle naturel du carbone». Sa répartition est donc variable alors que la quantité totale disponible sur Terre reste constante.

Par ailleurs, le mécanisme de la photosynthèse joue un rôle primordial dans le cycle du carbone. Grâce à la lumière du Soleil, l’eau absorbée par certains végétaux via leurs racines et le CO2 de l’air capté en général par leurs feuilles réagissent et produisent de l’oxygène ainsi que de l’énergie sous forme de glucose. Ce dernier permet la synthèse de matière organique via la construction de la paroi cellulaire de ces végétaux. L’être humain, entre autres espèces, se nourrissant de certaines plantes, le carbone circule du monde végétal vers le monde animal. À la mort d’un animal, son corps se décompose et se fossilise ensuite peu à peu. En outre, depuis un siècle, nous savons que les actions des humains ne sont pas non plus sans effet sur le cycle du carbone: nous utilisons des énergies fossiles pour nous déplacer, chauffer nos maisons…, ce qui modifie le réservoir fossile.

«Roi des éléments», le C est indispensable à la vie sur Terre et possède des propriétés chimiques uniques qui en font un composant essentiel dans la production des polymères et matières plastiques