Technologie

La plasturgie circulaire :un secteur d’avenir 

(2e partie)

Virginie CHANTRY • virginie.chantry@gmail.com 

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Dans l’édition précédente du magazine, nous examinions de plus près l’atome de carbone et ce qui en fait un élément si particulier et jusqu’à présent indispensable à la fabrication de plastique. Continuons notre périple et, toujours grâce aux experts présents à la journée du 7 octobre dernier «Circular Design in Plastics: vers la Plasturgie Circulaire», focalisons-nous maintenant sur les techniques de recyclage du plastique et la circularité de cette industrie en pleine transformation qu’est la plasturgie. À vos sacs PMC !

 
Chaque année, si tous les individus sur Terre se comportaient comme les Belges en 2022, les ressources que la planète peut régénérer en un an seraient épuisées le 26 mars, donc en à peine 84 jours. On parle du «jour du dépassement de la Terre» ou «Earth Overshoot Day» en anglais. Ce jour, à l’échelle de la planète, tombait le 28 ­juillet en 2022, contre le 22 août en 2020. 1969 a été la dernière année ­pendant laquelle la Terre ­«suffisait». Même si ­certains pays sur le globe sont moins ­gourmands que d’autres, nous vivons à ­crédit. Cela est dû à nos modèles économiques ­principalement linéaires: trop de ressources sont extraites et trop de déchets sont produits. Il faut donc ­repenser notre façon de faire en extrayant moins de ­ressources et en les utilisant de manière plus ­efficace, mais aussi en ­produisant moins de déchets et en les ­revalorisant via la ­réinjection dans le cycle ­suivant. C’est ce que prône ­l’économie ­circulaire. Pour rappel, le cycle de vie d’un produit est ­l’ensemble des étapes par lesquelles passe un produit, de la conception jusqu’à la fin de vie.

Le meilleur déchet est celui qui n’existe pas. Certes, mais pas évident au quotidien… Que faire pour s’en approcher ? Adopter une conduite anti-gaspillage reposant sur les «3R». Les voici, par ordre de l’importance qui devrait leur être accordée, appliqués aux plastiques:

·  Réduire: une diminution ou une absence pure et simple de fabrication et/ou de consom­mation implique une diminution des déchets produits. En tant que consom­mateur, il faut se demander si le produit que l’on désire tant nous sera vraiment utile. Et en tant que ­fabricant si le produit répond à un besoin réel. La sobriété et la simplicité sont donc des ­alternatives très efficaces à l’économie circulaire pour atteindre un modèle de consommation durable.

· Réutiliser: les déchets plastiques sont issus de produits ayant une durée de vie ou durée d’usage très variable. Dans le domaine des ­textiles, la fast fashion a considérablement réduit cette durée. Dans la construction, c’est plus raisonnable avec une moyenne qui tourne autour de 35 ans. Mais majoritairement, la durée de vie d’un produit est ­inférieure à 5 ans. Il faut donc mettre en place de ­nouvelles pratiques qui allongent cette durée afin de ­retarder un nouvel achat (et une ­nouvelle production) et augmenter la ­circularité. Par exemple, ­entretenir son ­matériel afin qu’il dure plus longtemps et le réparer quand il est défectueux si c’est applicable et faisable. On peut aussi penser de façon plus ­collaborative: emprunter, louer, échanger, revendre ou encore donner sont des pistes à considérer. Les fabricants ou fournisseurs de services ont également un rôle à jouer afin ­d’augmenter la durabilité et de ­diminuer l’obsolescence, qu’elle soit ­programmée ou culturelle, des ­produits et applications. Il est possible de ­remplacer la vente d’un bien par la vente de son usage comme les vélos ou ­voitures ­partagés, ou encore de se mettre à ­l’écoconception en augmentant la ­réparabilité, la recyclabilité ou encore la qualité d’un ­produit.

·  Recycler: les plastiques peuvent être ­réutilisés dans le cycle suivant, d’où le verbe ­«recycler». Ce thème étant un élément ­fondamental de l’économie circulaire, il est abordé en détail ci-après.

Circularité des plastiques

À ce jour et sans trop grande surprise, le cycle de vie des plastiques est rarement circulaire. Si l’on souhaite réduire l’exploitation des ressources, c’est pourtant bien vers cela qu’il faut se diriger. Afin de quantifier l’aspect circulaire de la fabrication d’un produit, d’un procédé en particulier ou d’une activité, il existe des outils comme le très populaire Material Circularity Indicator (indicateur de circularité des matériaux) ou MCI, développé par la Fondation Ellen MacArthur prônant l’économie circulaire à travers le monde et étant d’ailleurs LA référence dans le domaine. Compris entre 0 et 1, il dépend des matériaux utilisés pour fabriquer un produit et de sa fin de vie. Il mesure le degré de circularité, la note de 1 ou 100% étant le graal et très difficile à atteindre. Par exemple, aucune «nouvelle» matière première ne doit être utilisée pour fabriquer le produit et ce dernier doit être recyclé à 100% en fin de vie. Car attention, ce n’est pas parce qu’un produit est recyclable qu’il est forcément recyclé !

Le MCI ne tient cependant pas compte de l’impact environnemental et doit donc absolument être combiné à une Analyse du Cycle de Vie (ACV), outil d’aide à la prise de décision et à l’évaluation de la pertinence de la démarche circulaire. Car qui dit circulaire, ne dit pas forcément économie de ressources, ni bénéfique pour l’environnement: un produit peut être très circulaire et potentiellement recyclable un bon nombre de fois tout en ayant un impact désastreux sur l’environnement ! Il est donc indispensable de tenir compte, de la façon la plus objective possible, de l’impact de tous les procédés impliqués qui doivent être inventoriés et décortiqués afin d’obtenir, pour chacun d’entre eux, tous les flux de matière et d’énergie. En adoptant une approche holistique, l’ACV permet de quantifier des impacts tels que destruction de la couche d’ozone, changement climatique, disparition des ressources, écotoxicité, toxicité humaine… et d’établir un diagnostic des performances environnementales d’un produit tout au long de son cycle de vie. La fin de vie et le recyclage sont également passés au crible: collecte et transport des déchets, utilisation d’additifs (stabilisants, pigments…), consommation d’énergie, résidus du procédé… sont autant de paramètres à considérer.