Dossier

Cortex préfrontal: un espace de délibération

©Emanuel Corso – stock.adobe.com, ©R. LEVY, ©ita_tinta_ – stock.adobe.com

Le cortex préfrontal peut être considéré comme notre cortex le plus noble. Dès que la nouveauté, le changement ou la complexité pointent le bout du nez, c’est à lui de prendre les choses en main

 
Situé derrière le front, le lobe frontal du cerveau renferme 3 entités: le cortex préfrontal, le cortex prémoteur et le cortex moteur primaire. Le premier est un support cardinal de processus cognitifs de haut niveau, les fonctions exécutives. Ces dernières nous permettent d’adapter notre comportement aux situations nouvelles ou complexes, celles pour lesquelles ne peuvent suffire les routines d’action, les comportements automatiques accomplis de façon essentiellement inconsciente comme, par exemple, quand nous pédalons à vélo en ligne droite. Le cortex préfrontal, qui constitue la partie antérieure du lobe frontal, représente à lui seul environ un tiers du volume cérébral chez l’Homme. Imposante structure donc, il apparaît comme l’orchestrateur de notre pensée consciente.

Les fonctions exécutives sont multiformes, ainsi que le soulignait en 1997 Patrick Rabbit, de l’Université de Manchester. Tantôt elles concourent à la formulation d’un but, à la planification et au choix des séquences de comportement à adopter pour l’atteindre, à la comparaison de l’efficacité de différentes stratégies, à la mise en œuvre du plan sélectionné jusqu’à son accomplissement final, à son amendement éventuel en cas d’échec. Tantôt elles participent à la recherche consciente d’informations spécifiques en mémoire ou à l’allocation des ressources attentionnelles permettant le passage d’une séquence de comportement à une autre mieux en phase avec les exigences de l’environnement. Tantôt encore elles coordonnent la réalisation simultanée de 2 tâches, font obstacle à la mise en œuvre de comportements automatiques et inappropriés, détectent des erreurs et les corrigent. Toujours selon Rabbit, les fonctions exécutives contribueraient également au maintien de l’attention soutenue sur de longues périodes de temps. De la sorte, elles rendraient possible l’exercice d’un contrôle élevé sur le déroulement de séquences de comportements prolongées.

Comme le rappelle Richard Levy, professeur de neurologie à la Sorbonne, directeur de l’Institut de la mémoire et de la maladie d’Alzheimer à l’hôpital de la Pitié-Salpêtrière et chef du laboratoire FRONTlab à l’Institut du cerveau (ICM, Paris), il est donc question, entre autres, de planification, de manipulation mentale d’informations, d’inhibition, de flexibilité, d’abstraction, d’élaboration de règles ou encore de résolution de problèmes. En collaboration avec des structures postérieures du cortex cérébral appartenant aux lobes pariétaux et temporaux et avec les ganglions de la base, structures enfouies dans la profondeur des hémisphères cérébraux, le cortex préfrontal fait office d’orchestrateur de la pensée dans la mesure où il active les comportements volontaires utiles et bloque les comportements automatiques et inappropriés. Pour y arriver, il convoque différents outils de la pensée, tels que la mémoire et le langage par exemple. Richard Levy résume la situation par le biais d’une image: «Le cortex préfrontal n’est pas une structure qui crée une musique, mais qui l’orchestre pour qu’elle soit en harmonie avec le but poursuivi.» Toutefois, le neuroscientifique rappelle aussitôt que le cortex préfrontal n’est pas seulement un chef d’orchestre, mais également le support de comportements inédits nécessaires pour répondre à des situations nouvelles, complexes ou changeantes. Il est alors au service de la créativité de la pensée.

Un tampon entre perception et action

Si nous étions sans cesse confrontés à des situations invariantes, des comportements purement automatiques suffiraient à nous permettre de répondre aux sollicitations de notre environnement – je perçois, j’agis. En l’absence de cette invariance, la mise en œuvre de comportements volontaires s’avère indispensable et nous oblige à sortir de la boucle perception-action qui engendre les comportements automatiques. Le rôle du cortex préfrontal est de s’immiscer entre les 2 éléments de la boucle afin de faire intervenir entre eux des représentations mentales qui vont modeler une action volontaire. Il crée donc un «espace de délibération» grâce auquel la décision que nous allons prendre ne sera pas fondée uniquement sur l’information perçue dans l’environnement immédiat, qu’il soit exogène (informations en provenance du monde extérieur) ou endogène, comme lorsqu’on éprouve des sensations de faim ou de soif. Ainsi, un homme d’affaires qui négocie un contrat ne quittera pas ses interlocuteurs pour aller manger une pizza ou un hamburger même si son estomac crie famine. Ses fonctions exécutives inhiberont théoriquement l’action inappropriée que son envie du moment pourrait le pousser à entreprendre. Pour ce faire, elles pourront convoquer des représentations mentales ayant trait, par exemple, aux convenances sociales, à la nécessité d’avancer dans la discussion pour obtenir la signature de l’autre partie, à des souvenirs de négociations antérieures qui s’étaient bien ou mal terminées, etc. Sorte d’espace tampon entre la perception et l’action, l’espace mental de délibération permet d’activer à la fois des représentations multiples du passé et des représentations prospectives, de les manipuler et d’anticiper les conséquences futures de nos décisions.

En collaboration avec des structures postérieures du cortex cérébral appartenant aux lobes pariétaux et temporaux et avec les ganglions de la base, structures enfouies dans la profondeur des hémisphères cérébraux, le cortex préfrontal fait office d’orchestrateur de la pensée.

Sur la base d’études de patients présentant des lésions au niveau des lobes frontaux, il fut initialement suggéré que l’ensemble des fonctions exécutives siégeaient dans le seul cortex préfrontal. Il est apparu par la suite que leur substrat neuroanatomique est plutôt un réseau cérébral très distribué dans lequel le cortex préfrontal est certes crucial, mais pas isolé. En outre, pour l’accomplissement des tâches qui lui incombent en tant que pièce maîtresse d’un espace de délibération appelé à sous-tendre l’élaboration et le contrôle des comportements volontaires adaptés, le cortex préfrontal est connecté à différentes structures impliquées respectivement dans l’intégration des perceptions sensorielles, la mémoire, les émotions, l’homéostasie ou encore la préparation et l’exécution des mouvements.

Sur le plan anatomique, si l’on observe les 2 lobes frontaux (gauche et droit) comme si l’on pouvait voir derrière le front, chaque lobe apparaîtrait comme un triangle dont la base (ou «plancher») est posée sur les orbites (voir figure ci-contre). Cette zone dite «ventrale» est constituée elle-même de 2 sous-régions: les cortex orbitaire et ventromédian. Le sommet du triangle, où se rejoignent les 2 côtés, est la zone dite «dorsale», elle aussi constituée de 2 sous-régions: les cortex dorsolatéral et dorsomédian. Classiquement, les conséquences cliniques des lésions du cortex préfrontal varient grandement selon que la partie touchée est le sommet ou la base du cortex préfrontal. Dans le syndrome dorsal, qualifié aussi de syndrome cognitif, ce sont l’élaboration de la pensée abstraite et l’organisation de l’action qui sont affectées. Il s’agit de déficits purement cognitifs, relatifs à des opérations rationnelles «froides» touchant par exemple le raisonnement par analogie, le jugement, la planification ou la mémoire de travail. «Je parlerais d’ »opérations froides » pour la prise de décision», précise le professeur Levy. Dans le syndrome ventral (ou syndrome comportemental), on assiste au contraire à des troubles relatifs aux aspects affectifs et motivationnels du comportement, lesquels peuvent concerner les conduites, les relations sociales et l’humeur. Parlons ici de «cognition chaude».

Cette scission entre les parties hautes et basses du cortex préfrontal s’avère néanmoins assez théorique, entre autres parce qu’il existe de multiples interactions entre ces 2 grands ensembles. Le responsable du laboratoire FRONTlab prend l’exemple d’un champion d’échecs qui jouerait de façon inappropriée lors d’une compétition internationale du fait que son système cognitif (dorsal) très performant pâtirait d’un système affectif ou motivationnel (ventral) inadapté qui lui interdirait de contextualiser la situation. 

UN COCKTAIL EXPLOSIF

Dès lors que le cortex préfrontal est central pour le contrôle du comportement et pour les interactions sociales, quel peut être l’impact de son mauvais fonctionnement sur l’émergence, chez un individu, de l’agressivité et de la violence ? Ainsi que le rappelle le professeur Levy, la genèse de l’agressivité et de la violence est multifactorielle et il convient dès lors de se montrer très mesuré quand on s’interroge sur les liens entre des comportements hautement antisociaux et des lésions, dysfonctionnements ou anomalies structurelles et développementales du cortex préfrontal, les notions de morale et de responsabilité étant au cœur du débat.

Que sait-on ? Tout d’abord que les lésions des régions orbitaires du cortex préfrontal induisent des modifications affectives et émotionnelles pouvant entraîner des délits via 2 mécanismes principaux: la levée d’inhibition (non-respect des barrières sociales et impulsivité) et le manque d’empathie. «Le défaut d’inhibition et le manque d’empathie construit sur la théorie de l’esprit tracent le sillon d’un comportement «froid» sociopathe», dit Richard Levy, avant d’aborder un deuxième aspect, celui des nombreuses études menées en Europe du Nord, au Canada et aux États-Unis auprès de vastes populations de délinquants emprisonnés. «Ces recherches, qui reposaient sur des mesures du fonctionnement et de la structure anatomique du lobe frontal, ont fait apparaître que certains comportements sociopathiques de prisonniers étaient corrélés, entre autres, avec un hypométabolisme des régions ventrales du cortex préfrontal, voire même avec une diminution de volume de ces régions», rapporte-t-il.

Un aspect psychodynamique doit également être mis en exergue. Des travaux élémentaires chez le rat puis chez l’Homme, et ensuite des études de psychiatrie, se sont intéressés à la construction des comportements violents, en particulier lorsqu’ils sont impulsifs. Ces recherches ont montré les conséquences négatives de la conjonction, tôt dans la vie, d’un ensemble de 3 types de facteurs de risque qui, réunis, peuvent ensemencer le champ de la violence. Facteurs génétiques: par exemple, un déficit en sérotonine, dont la production est en partie génétiquement déterminée. Facteurs environnementaux: par exemple, avoir été un enfant battu par son père ou être né d’une mère dont l’alcoolisme a pu retentir sur la formation du fœtus. Ces 2 facteurs, combinés à des expériences de vie défavorables – par exemple, prendre régulièrement le dessus lors de bagarres dans la cour de récréation à l’école – peuvent construire un «cocktail» explosif de la violence comme constitutive de la vie d’une personne. «Quand les chercheurs leur présentaient des images violentes – d’égorgement, etc. -, les enfants cumulant ces 3 facteurs de risque activaient moins que les sujets contrôles l’amygdale et certaines régions du cortex préfrontal ventromédian. Plus tard, ces structures qui étaient en hypométabolisme durant l’enfance peuvent s’avérer moins développées à l’âge adulte chez les personnes violentes que chez des sujets « normaux »», souligne le chercheur de l’ICM. En filigrane se cachent les questions délicates de la récidive des actes délictueux, mais aussi de la prévention dans la petite enfance.

 
Une fluidité contrariée

Le cortex préfrontal doit également être appréhendé à travers une hiérarchie postéro-antérieure. Plus on chemine des régions caudales (postérieures) vers les régions rostrales (antérieures), plus les processus mentaux sont élaborés et conscients. Les lésions du cortex préfrontal rostral donnent lieu à une désorganisation subtile des comportements dans des situations complexes, bien que l’évaluation neuropsychologique classique soit souvent normale. «Le comportement de ces patients semble être spécifiquement inadapté dans des situations non structurées, lorsqu’il existe plusieurs façons possibles de se comporter, lorsque l’environnement ne dicte pas le comportement ou quand 2 tâches ou plus doivent être alternativement engagées», expliquaient Richard Levy et Emmanuelle Volle, chercheuse à l’ICM, dans un article publié dans la revue Médecine/Sciences.

Deux modèles principaux de cette hiérarchie postéro-antérieure ont été proposés en 2007: le modèle d’abstraction des représentations de l’action dû à David Badre et Mark D’Esposito, de l’Université de Californie à Berkeley, et le modèle en cascade du contrôle cognitif, né des travaux d’Étienne Koechlin et Christopher Summerfield, chercheurs de l’Inserm au Département d’études cognitives de l’École normale supérieure (Paris). Les 2 modèles placent le cortex préfrontal rostral au sommet de la hiérarchie postéro-antérieure. Comme l’écrivent Emmanuelle Volle et Richard Levy, le modèle d’abstraction des représentations de l’action postule «une organisation hiérarchique du cortex préfrontal latéral (aspects cognitifs) en fonction du niveau d’abstraction des représentations mentales guidant la sélection de l’action». En bref, plus le traitement de l’information fait appel à l’abstraction, plus il a lieu vers l’avant du cortex préfrontal.

La thèse du modèle en cascade du contrôle cognitif est que la hiérarchie dans le recrutement des différentes régions préfrontales est fonction de la quantité des informations dont il faut tenir compte pour décider d’une action et du lien temporel entre ces informations et cette action. «La gestion d’informations plus nombreuses
et/ou plus éloignées dans le temps recruterait des régions plus antérieures
», dit Richard Levy. Les informations lointaines, surtout si elles sont nombreuses, sont particulièrement sujettes à des disruptions temporelles, à des ruptures qui entravent la fluidité de leur écoulement comme des obstacles contrarieraient l’écoulement des eaux d’un fleuve. Les administrer est d’autant plus complexe. Aussi de nombreuses disruptions dans la succession des informations à prendre en considération dans notre espace mental de délibération avant de définir une action seraient‑elles associées à l’activation des régions les plus antérieures du cortex préfrontal. «Les modèles de Badre et D’Esposito, d’une part, et de Koechlin et Summerfield, d’autre part, se rejoignent en ce sens qu’ils postulent tous les 2 que plus on va vers l’avant du cortex préfrontal, plus les informations traitées sont complexes», précise le professeur Levy. 

Le cortex préfrontal doit être appréhendé à travers une hiérarchie postéro-antérieure. Plus on chemine des régions caudales (postérieures) vers les régions rostrales (antérieures), plus les processus mentaux sont élaborés et conscients. Les lésions du cortex préfrontal rostral donnent lieu à une désorganisation subtile des comportements dans des situations complexes.

Des associations à distance

Selon le chercheur de l’ICM, il est très probable, de surcroît, que les parties les plus antérieures du cortex préfrontal soient des supports clés de la créativité. Celle-ci implique que l’on soit à même de créer ou de recréer des liens sémantiques, c’est-à-dire de signification, de sens, entre des informations qui, au départ, sont peu liées ou ne sont pas liées l’une à l’autre. Car le processus créatif n’aboutit pas à l’émergence de solutions ex nihilo. Au contraire, la cognition créative s’enracinerait dans la capacité à former des associations à distance entre des concepts existants – un tableau de Rembrandt et une brosse à dents, par exemple.

Dans ce contexte, la mémoire sémantique, celle de nos connaissances générales sur le monde (1), revêt une importance primordiale. Ce constat a éveillé un modèle de la hiérarchie postéro-antérieure du cortex préfrontal qui attribue aux régions les plus rostrales la faculté de créer ou de recréer des liens entre des concepts sémantiquement très éloignés. Prenons le cas d’une information A et d’une information B qui ne sont pas directement reliées par un «nœud» sur le plan sémantique et qui ne peuvent dès lors se rejoindre qu’après être passées par un grand nombre de nœuds – de carrefours de la pensée, pourrait-on dire. «Les informations A et B n’étant pas naturellement ou automatiquement liées l’une à l’autre, il y a une disruption sémantique entre elles. On rejoint ici une idée très proche de celle de la disruption temporelle présentée dans le modèle en cascade du contrôle cognitif, de Koechlin et Summerfield. Une hypothèse est que les structures très antérieures du cortex préfrontal permettent de créer ou de recréer des liens aussi bien entre des informations temporelles qu’entre des informations sémantiques qui, dans les 2 cas, n’en ont pas ou en ont peu», déclare le professeur Levy.

Les modèles centrés respectivement sur l’abstraction, sur la quantité et la temporalité des informations et sur la créativité ont comme précurseur commun le modèle plus ancien de la mémoire de travail, qu’ils sont venus enrichir. Le rôle dédié à l’espace de délibération précédemment évoqué semble parfaitement en phase avec le concept de mémoire de travail, celle-ci ayant pour fonction le maintien temporaire, la manipulation et l’utilisation de représentations mentales jusqu’à la réalisation d’une action en cours d’élaboration. 

 
Une barre de fer

Le professeur Levy insiste sur le fait que toutes les pathologies qui touchent le système nerveux central sont susceptibles d’affecter directement ou indirectement le cortex préfrontal.

Il existe 2 grands types de lésions focales non dégénératives du lobe frontal. Primo, la rupture d’anévrisme au niveau de l’artère communicante antérieure qui relie les 2 artères cérébrales antérieures. S’ensuit une irruption de sang dans la partie orbitaire du lobe frontal, ce qui entraîne l’apparition du syndrome frontal ventral se manifestant par des troubles des affects et de la motivation. Secundo, le méningiome, tumeur bénigne se développant à partir des méninges. Lorsqu’il comprime la partie orbitaire du cortex préfrontal, les patients, dont le Q.I. est pourtant normal, éprouvent des difficultés à prendre des décisions opportunes dans la vie quotidienne. En général, ils présentent également un changement de personnalité à l’instar de Phineas Gage, ouvrier des chemins de fer du Vermont – et cas prototypique – dont l’avant du cerveau fut transpercé par une barre de fer de 3 cm de diamètre le 13 septembre 1848. Homme aimable et moralement irréprochable jusque-là, Gage devint irascible, grossier et asocial.

Dans les maladies neurodégénératives, la démence frontotemporale débute dans sa forme principale par des troubles insidieux du comportement appelés à s’aggraver, dus à une atteinte de la partie basale orbitaire du cortex préfrontal. Surviennent alors des déficits dans l’inhibition comportementale, les rapports sociaux, la motivation et les comportements alimentaires. Ainsi, certains patients, désinhibés, en viennent à manger compulsivement de larges portions de nourriture, à uriner en public, à aborder tout un chacun de manière plus que familière, etc. Les lésions s’étendent ensuite aux régions latérales du cortex préfrontal, engendrant des syndromes cognitifs (déficiences dans l’élaboration de la pensée abstraite, le raisonnement, le jugement…), puis à des régions plus postérieures telles que les lobes temporaux, avec pour conséquences des troubles du langage, des connaissances sémantiques ou de la mémoire. La maladie d’Alzheimer, elle, n’est pas exempte d’atteintes frontales qui se révèlent parfois précocement. Elles concernent le cortex préfrontal latéral et se traduisent dès lors par des syndromes cognitifs. «Un symptôme relativement précoce de la maladie d’Alzheimer est l’anosognosie, trouble dans lequel une personne atteinte d’une maladie ou d’un handicap ne semble pas avoir conscience de son état, fait remarquer le professeur Levy. Ces dernières années, les études attribuent l’anosognosie à un dysfonctionnement du cortex préfrontal. Par ailleurs, on observe des troubles discrets de l’attention et de la vitesse de traitement de l’information chez certains patients, et ce, avant même l’apparition des troubles de la mémoire épisodique (2). Ils pourraient être en relation avec une atteinte du cortex préfrontal

Différentes études en imagerie par résonance magnétique fonctionnelle (IRMf) se sont intéressées à la schizophrénie. Elles ont dévoilé des dysfonctionnements de la région dorsolatérale du cortex préfrontal avec une atteinte des fonctions exécutives. Dans l’autisme se manifestent des défauts au niveau du versant affectif (3) de la «théorie de l’esprit», laquelle se réfère à l’aptitude qu’a un individu d’attribuer des états mentaux inobservables, tantôt cognitifs, tantôt affectifs, à soi ou à autrui en les déduisant principalement des expressions émotionnelles ou des attitudes. Chez l’autiste, cette capacité fondamentale pour la cognition sociale est mise à mal. Carence qui semble liée à une atteinte de la partie ventromédiane du cortex préfrontal. Mais rappelons-le, toutes les autres pathologies touchant le système nerveux central (AVC, dépression…) peuvent donner lieu à des dysfonctionnements de notre cortex le plus noble.

(1) Grâce à la mémoire sémantique, nous savons notamment non seulement que Rome est la capitale de l’Italie et que Ronald Reagan fut président des États-Unis, mais aussi, par exemple, que dans un restaurant, il convient de s’asseoir, de consulter le menu, de manger, de réclamer l’addition et de payer.

(2) La mémoire épisodique permet le stockage et la prise de conscience d’épisodes personnellement vécus.

(3) La théorie de l’esprit comporte un aspect affectif et un aspect cognitif.

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