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Thibault GRANDJEAN • grandjean.thibault@gmail.com

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Dix ans de plus pour le glyphosate

Le 16 novembre dernier, l’Union européenne a prolongé jusqu’en 2033 l’autorisation d’utilisation du glyphosate par les agriculteurs européens. Une décision très attendue et critiquée, en raison de la vive controverse scientifique actuelle sur la toxicité de l’herbicide.

Dans les années 1970, le N-(phosphonomethyl)glycine, plus connu sous le nom de glyphosate, a été breveté par la firme Monsanto, en raison de ses excellentes propriétés herbicides. Elle le commercialise alors en 1974 sous le nom de RoundUp. La substance connaît un immense succès, et est aujourd’hui encore l’herbicide le plus utilisé au monde. Et depuis que sa formule est tombée dans le domaine public, on le retrouve dans plus de 750 produits, vendus par 90 fabricants.

Le glyphosate est un herbicide total, c’est-à-dire qu’il fonctionne sur tous les types de plantes ou presque, avec un mode d’action simple: il inhibe la synthèse d’acides aminés qui sont indispensables à leur bon fonctionnement. Majoritairement utilisé par pulvérisation, il adhère cependant mal aux feuilles et doit être utilisé en combinaison avec d’autres molécules, comme dans le RoundUp. Une fois absorbé, il se diffuse au reste de la plante via la sève.

Au départ, le glyphosate était conçu pour être directement utilisé sur les mauvaises herbes, afin de désherber les champs avant d’y planter les cultures. Mais Monsanto a ensuite conçu une méthode bien plus efficace: en modifiant génétiquement les plantes, la firme américaine a ainsi créé des variétés de soja, de maïs ou encore de coton résistantes au glyphosate. Les agriculteurs pouvaient alors épandre directement le RoundUp sur leurs cultures, détruisant ainsi toutes les plantes non cultivées. Cette technique est encore aujourd’hui très utilisée aux Etats-Unis, au Canada ou encore dans les grands pays agricoles d’Amérique du Sud qui exportent alors ces produits chez nous.

Car en Europe, la culture d’OGM est interdite. Pourtant, l’utilisation de glyphosate y a fortement augmenté depuis le début des années 2000, et ce en raison de la pratique de la dessiccation. Au lieu d’être utilisé avant les récoltes, les agriculteurs l’épandent dans les champs juste avant les moissons. Cette technique permet de supprimer les mauvaises herbes présentes dans la culture, et d’homogénéiser et d’accélérer la maturité des plantes. Elle a cependant pour conséquence d’augmenter sa présence dans les produits destinés à l’alimentation, et est désormais interdite depuis le renouvellement de l’autorisation de l’herbicide.

En raison de son utilisation massive à travers le monde, on retrouve aujourd’hui le glyphosate et ses dérivés dans de nombreux milieux comme les sols, les nappes phréatiques, et jusque dans nos propres corps. En 2016, une étude allemande a montré que 99 % de la population avait des traces détectables dans leurs urines, dont plus des trois quarts de façon significative.

Une contamination qui est loin d’être anodine: de nombreuses études ont pointé sa toxicité pour la biodiversité, et le glyphosate a même été classé comme cancérogène probable pour l’être humain en 2015 par le CIRC, le Centre international de Recherche sur le Cancer, l’agence de l’Organisation Mondiale de la Santé. En 2021, l’Inserm en France a également conclu à des risques pour l’ADN, la santé reproductive et la santé neurologique humaines.

En dépit de ces informations, en juillet 2023, l’Autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA) a une nouvelle fois conclu que l’herbicide ne présentait pas de risque majeur pour la santé ou l’environnement, avis qui a été suivi par la Commission européenne. Cette différence notable de résultats est due à la méthode d’analyse : pour rendre ses conclusions, l’EFSA se base en priorité sur des études standardisées menées par les fabricants eux-mêmes, et non par des chercheurs indépendants. De plus, la plupart des études concluant au caractère inoffensif du glyphosate l’ont été sur la substance seule, alors même que plusieurs laboratoires ont montré que les additifs utilisés pour aider l’herbicide à pénétrer dans la plante jouent un rôle majeur dans sa toxicité. 

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L’ACTU DES LABOS 

Du plastique à base de dioxyde de carbone 

Des 9 milliards de tonnes de plastiques générées entre 1950 et 2017, plus de la moitié n’a été produite qu’après 2004 ! Et si la demande globale continue, on estime que la production annuelle atteindra 1,1 milliards de tonnes en 2050. Il y a donc urgence à réguler cette consommation, en diminuant les plastiques à usage unique, mais également en trouvant des solutions plus durables pour ceux pour lesquels il n’existe pas d’alternative à l’heure actuelle. Car si les plastiques vierges continuent à être massivement utilisés, c’est parce que nombre d’entre eux ne se recyclent pas, ou mal. Mais la recherche avance: une équipe de chercheurs de l’ULiège et de l’UMons a mis au point une nouvelle technique de production en y injectant du dioxyde de carbone, l’un des autres grands polluants de notre époque. Les plastiques ainsi produits possèdent une grande variété de propriétés, pouvant être très malléables, ou au contraire très rigides. Et leur structure leur permet de subir plusieurs cycles de recyclage, sans détérioration des matériaux.

   Habets et al. J. Am. Chem. Soc. 2023

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Des probiotiques maternels pour lutter contre l’asthme